Un chemin vers l'avenir

Mise en contexte – Un plan d'action nécessaire

Mise en contexte

Un plan d'action nécessaire

En mars dernier, j’ai publié un rapport dans lequel je demandais qu’on légifère sur le Bureau de l’Ombudsman, ajoutant ainsi ma voix et mon expérience à celles de mes quatre prédécesseurs1. Le raisonnement initial derrière l’intention de légiférer sur le Bureau demeure aussi valide aujourd’hui – peut-être même davantage – qu’à la création du Bureau, en juin 1998. Selon moi, les arguments en faveur de l’inscription du Bureau dans la loi sont convaincants et essentiels à l’existence du Bureau à long terme et à son efficacité.

Toutefois, dans sa réponse à mon rapport, intitulé Plaidoyer en faveur d’un bureau d’Ombudsman permanent et indépendant, le ministre de la Défense nationale soutient le cadre de gouvernance actuel et se dit convaincu que les dirigeants du ministère et du Bureau de l’Ombudsman continueront de s’appuyer sur les processus existants et de les améliorer dans le but d’assurer une bonne intendance et une utilisation efficace des ressources publiques2.

Malgré des points de vue différents, il est clair que le Bureau de l’Ombudsman doit pour le moment continuer de fonctionner dans le cadre administratif actuel. En conséquence, un plan d’avenir est nécessaire pour nous assurer que le Bureau de l’Ombudsman est en mesure de remplir les devoirs décrits dans son mandat en toute indépendance face à la direction du ministère et de la chaîne de commandement des Forces armées canadiennes, soit les organisations qu’il est appelé à surveiller.

Je n’ai pas l’intention de réitérer les arguments en faveur de législation, que j’ai élaborés dans le rapport susmentionné. J’adopte plutôt ici une approche pratique qui permettra au Bureau de fonctionner dans une structure de gouvernance comportant des lacunes inhérentes. Ce plan d’action cherche la flexibilité dans les instruments législatifs et réglementaires existants, de manière à assurer l’indépendance opérationnelle de l’Ombudsman tout en respectant les responsabilités et devoirs du sous-ministre. 

Gouvernance dans le système fédéral canadien – Concepts élémentaires

Dans la fonction publique fédérale, toutes les activités nécessaires au fonctionnement des organisations gouvernementales sont menées grâce à des pouvoirs législatifs. La législation peut octroyer les pouvoirs aux ministres, aux administrateurs généraux des ministères ou à des agences centrales. Les pouvoirs octroyés aux ministres ou aux agences centrales peuvent être délégués aux administrateurs généraux. Pour que le travail soit fait, les administrateurs généraux délèguent ou sous-délèguent ces pouvoirs à des directeurs au sein de leurs structures hiérarchiques. Pour s’assurer que les pouvoirs délégués sont bien exercés et que les délégataires rendent des comptes, on établit habituellement des politiques et des procédures de contrôle internes. Ultimement, la responsabilité de l’exercice approprié des pouvoirs incombe au détenteur des pouvoirs – la plupart du temps l’administrateur général.

Statut de l’Ombudsman

Le gouverneur en conseil nomme l’Ombudsman pour diriger le Bureau de l’Ombudsman du MDN et des FAC. L’Ombudsman rend des comptes au ministre de la Défense nationale et relève directement de celui-ci. L’importance de l’indépendance du Bureau est ce qui a motivé ce lien hiérarchique direct avec le ministre, plus particulièrement le fait que, pour être efficace, l’Ombudsman doit être exempt, dans les faits et en apparence, de toute influence de la part du ministère dont il doit examiner les décisions.

Le Bureau de l’Ombudsman est établi en vertu d’une Directive ministérielle, avec l’appui des Directives et ordonnances administratives de la défense (DOAD)3. Ces instruments n’ont pas force de loi et ne confèrent pas les pouvoirs en matière de finances et de ressources humaines qui sont nécessaires pour gérer une organisation gouvernementale. Pour que l’Ombudsman ait ces pouvoirs, il faudrait que son mandat fasse l’objet d’une législation et qu’il ait le statut d’administrateur général.

Même si les Directives ministérielles précisent que l’Ombudsman est indépendant et relève directement du ministre de la Défense nationale, dans la structure de gouvernance actuelle, l’Ombudsman fait partie du cadre ministériel. Ainsi, la réalité actuelle est que l’Ombudsman ne peut fonctionner sans les pouvoirs en matière de finances et de ressources humaines qui sont octroyés au sous-ministre – un fonctionnaire dont ne relève pas l’Ombudsman.

Une solution axée sur les intérêts est nécessaire

Il convient de répéter que lorsque le Bureau de l’Ombudsman a été mis sur pied, l’intention était de tirer profit du cadre administratif en place au Ministère, seulement jusqu’à ce qu’on puisse mettre le mandat à l’épreuve et promulguer la règlementation. Pour les raisons décrites dans le rapport susmentionné, cette situation temporaire est devenue permanente.

La complexité de la structure de gouvernance qui en découle a été reconnue par toutes les administrations politiques et ministérielles depuis la création du Bureau de l’Ombudsman. Le vérificateur général du Canada a aussi signalé cet enjeu dans son rapport du printemps 2015, recommandant que le sous-ministre et l’Ombudsman travaillent de pair pour s’assurer que les pouvoirs délégués par le sous-ministre fonctionnent comme prévu sans entraver l’indépendance opérationnelle de l’Ombudsman4.

De fait, ce ne sont pas les intérêts du sous-ministre et de l’Ombudsman qui sont en conflit. Le problème se situe plutôt au niveau du cadre dans lequel se retrouvent ces intérêts. Par exemple, il est dans l’intérêt de tous d’assurer une bonne intendance des ressources publiques, ce qui englobe nécessairement des mécanismes de contrôle et une reddition de comptes. De plus, il est dans l’intérêt collectif de la communauté de la défense que l’Ombudsman puisse s’acquitter de son mandat et offrir les services requis à ses commettants.

La solution réside dans la protection des intérêts substantiels qui sont en jeu au lieu de l’application rigide du cadre où se trouvent ces intérêts. Notre cadre législatif et réglementaire n’est pas prescriptif au point de ne pouvoir satisfaire tous les intérêts et répondre aux objectifs exprimés par le ministre de la Défense nationale et du vérificateur général du Canada

Je crois que cela peut être accompli par une approche de gouvernance axée sur les intérêts. Je crois que cela peut être accompli avant le 20e anniversaire de la mise sur pied de mon organisation et avant l’entrée en fonction du prochain ombudsman.

Le point de départ de mon plan d’action est l’évaluation des divers intérêts et la recherche de moyens pour les aligner et les faire travailler ensemble.

Énoncé des intérêts

L’intérêt du Bureau de l’Ombudsman est de servir ses commettants, les membres de la communauté de la défense qui pensent avoir été traités de façon injuste ou inappropriée par le MDN ou les FAC. Pour y arriver, il est essentiel de détenir tous les pouvoirs nécessaires au fonctionnement efficace et indépendant du Bureau et à la réalisation du mandat décrit dans les Directives ministérielles. Cela implique de mener ses activités d’une façon qui respecte les principes d’un ombudsman, c.-à-d. indépendance, impartialité, confidentialité et équité5. Ces principes sont importants parce qu’ils constituent le critère de mesure de toutes les fonctions d’un ombudsman. De plus, lorsque nous menons nos activités en respectant ces principes, les commettants sont confiants que leurs plaintes seront examinées de façon impartiale par une organisation qui ne subit pas l’influence du ministère qu’il surveille.

Afin de gérer l’organisation en toute indépendance par rapport au ministère, mais dans la structure administrative de ce dernier, l’Ombudsman a besoin de ce qui suit :

  • Des pouvoirs stables, constants d’un ombudsman à l’autre et d’une administration ministérielle à l’autre
  • La délivrance en temps opportun des pouvoirs délégués
  • La reconnaissance substantielle de son statut indépendant dans les délégations et les politiques générales
  • Le respect du lien hiérarchique direct de l’Ombudsman avec le ministre de la Défense nationale
  • La capacité de déterminer la meilleure façon d’exécuter le mandat en toute indépendance face au Ministère

L’intérêt du sous-ministre, comme l’indique le rapport du printemps 2015 du vérificateur général du Canada et dans les nombreux échanges écrits, est de s’assurer que les délégataires de ses pouvoirs exercent adéquatement les responsabilités et devoirs définis par la loi. On peut raisonnablement penser que cela dépend de conditions assurant au sous-ministre ce qui suit :

  • Des contrôles administratifs assurant l’exercice adéquat des délégations
  • Le pouvoir discrétionnaire de déléguer ou sous-déléguer les pouvoirs conformément aux besoins administratifs et réglementaires du ministère
  • La capacité de façonner les politiques ministérielles

Une approche holistique

De nombreux échanges écrits sur l’enjeu de la gouvernance ont eu lieu entre les titulaires du poste d’ombudsman et les administrations ministérielles et politiques passées. On constate dans la documentation le sujet récurrent de la capacité de l’Ombudsman de fonctionner de façon indépendante face au Ministère et dans le respect du mandat décrit dans les Directives ministérielles.

Une grande partie de cette correspondance a été motivée par une série d’enjeux de gouvernance singuliers qui devaient être résolus dans le contexte d’un dossier ou d’une enquête en cours. D’autres enjeux sont apparus lorsque les pouvoirs de l’Ombudsman ont été altérés sans préavis ou lorsque les politiques ministérielles ont changé sans qu’on ait considéré l’impact sur les activités de l’Ombudsman. Traiter chaque enjeu séparément s’est avéré improductif.

Au lieu d’une approche parcellaire, je recommande une approche holistique et proactive afin de trouver une solution axée sur les intérêts. Le résultat espéré est un plan directeur pour garantir au Bureau des pouvoirs opérationnels stables comprenant un raisonnement suffisamment convaincant pour être accepté par tous les titulaires et administrations à venir (ministre de la Défense nationale, sous-ministre, nouvel employé ou ombudsman).


  1. Canada, Ombudsman de la Défense nationale et des Forces canadiennes, Plaidoyer en faveur d’un Bureau d’Ombudsman permanent et indépendant, Ottawa, 2017. En ligne : http://www.ombudsman.forces.gc.ca/fr/ombudsman-rapports-statistiques-investigations-plaidoyer-en-faveur-d-un-bureau-d-ombudsman-permanent-et-independant/plaidoyer-en-faveur-d-un-bureau-d--ombudsman.page.
  2. Canada, ministre de la Défense nationale, Réponse du Ministre : Plaidoyer en faveur d’un Bureau d’Ombudsman permanent et indépendant, Ottawa, 2017. En ligne : http://www.ombudsman.forces.gc.ca/fr/ombudsman-nouvelles-activites-medias-lettres/response-from-mnd-governance.page.
  3. Canada, ministre de la Défense nationale, Directives ministérielles concernant l’Ombudsman du ministère de la Défense nationale et des Forces canadiennes, Ottawa, 2001 (Directives ministérielles); Canada, sous-ministre et chef d’état-major de la défense, Directives et ordonnances administratives de la défense, article 5047-1 (Bureau de l’Ombudsman), np : 2001 (DOAD 5047-1).
  4. Vérificateur général du Canada, Bureau de l’Ombudsman du ministère de la Défense nationale et des Forces canadiennes (rapport 7), Ottawa, 2015. En ligne : http://www.oag-bvg.gc.ca/internet/Francais/parl_oag_201504_07_f_40353.html.
  5. Voir l’annexe A du présent rapport pour des précisions sur les principes d’ombudsman.
Plan d'action – Octroi des délégations de pouvoirs

Plan d'action

Le présent plan d’action aborde de nombreux problèmes de gouvernance qui nuisent au Bureau de l’Ombudsman. Il décrit au besoin les intérêts en jeu et la façon d’aborder ces difficultés sans compromettre le cadre législatif du ministère ou les responsabilités du sous-ministre. Cette approche n’offre pas une solution complète comme pourrait l’offrir l’approche législative, mais elle donnera au Bureau de l’Ombudsman une meilleure stabilité pour s’acquitter de son mandat.

Octroi des délégations de pouvoirs

Parce que la plupart des délégations sont octroyées par le sous-ministre, l’Ombudsman doit compter sur les décisions de chaque titulaire de ce poste. En conséquence, l’Ombudsman n’a aucune garantie quant à la continuité des pouvoirs fonctionnels nécessaires à la gestion de son organisation.

En fait, chaque Ombudsman titulaire a dû composer avec des délais pour obtenir l’ensemble des pouvoirs délégués. Qui plus est, ces pouvoirs délégués ont changé au cours des dix-neuf années d’existence du Bureau. Ils ont changé d’un sous-ministre à l’autre, voire durant le mandat d’un même sous-ministre. Il y a eu de nombreux cas où les délégations ont été retardées, tronquées ou entièrement retirées, souvent sans avis à l’Ombudsman ni discussion avec celui-ci.

Plusieurs raisons expliquent ces changements aux pouvoirs délégués et l’état d’instabilité dans lequel nous nous trouvons maintenant. Lors des premières années et durant le mandant du premier titulaire, le dialogue était entièrement consacré à la négociation des pouvoirs initiaux et de la règlementation souhaitée. Les titulaires suivants ont continué de faire pression pour qu’on légifère. Cependant, les délégations de pouvoir réelles sont demeurées relativement stables et les problèmes ont été traités au cas par cas. S’il y avait des changements aux pouvoirs délégués ou à la filiation administrative, ils étaient le fait des directives de l’agence centrale ou des décisions du sous-ministre quant aux modes de reddition de comptes dans la structure hiérarchique du ministère.

Les changements les plus importants aux pouvoirs délégués ont eu lieu à la suite du rapport du printemps 2015 du vérificateur général du Canada6. Ce rapport soulevait un certain nombre d’enjeux, notamment l’incohérence des mécanismes de contrôle visant le Bureau de l’Ombudsman. Le vérificateur général recommandait que les dirigeants du ministère de la Défense nationale et du Bureau de l’Ombudsman s’attaquent aux problèmes en tenant compte des intérêts organisationnels respectifs.

Depuis le rapport du vérificateur général, l’Ombudsman actuel a amélioré les mécanismes de contrôle internes pour assurer la conformité avec les obligations dictées par la législation et les politiques. De plus, en réaction au rapport, l’Ombudsman a invité le ministère à mener des audits périodiques afin d’assurer l’exercice adéquat des pouvoirs délégués. Il convient de mentionner que depuis, il est ressorti de tous les audits financiers que la gestion financière de l’Ombudsman est solidement encadrée.

Regrettablement, toutefois, le rapport du vérificateur général a engendré un changement de pratique au ministère, allant d’une approche de laisser-faire à une approche restrictive de sa relation administrative avec le Bureau de l’Ombudsman7. L’équilibre est rompu, car on a basculé trop loin du côté restrictif, ce qui nuit aux intérêts de l’Ombudsman et à sa capacité de fonctionner efficacement.

Les tableaux suivants (en ligne : voir le lien à droite de cette section) donnent un aperçu des changements aux pouvoirs délégués en finances et en ressources humaines qui causent des difficultés au Bureau de l’Ombudsman8

Le Bureau de l’Ombudsman doit jouir de pouvoirs fonctionnels stables motivés par un raisonnement éclairé

Il est crucial que le Bureau de l’Ombudsman jouisse de pouvoirs fonctionnels stables et se voie déléguer les pouvoirs requis pour réaliser son mandat et satisfaire ses besoins opérationnels.

Même si l’octroi des pouvoirs qui lui incombent est la prérogative de chaque sous-ministre, les délégations de pouvoirs doivent être fondées sur une interprétation judicieuse des politiques.

En ce qui concerne les pouvoirs délégués au Bureau de l’Ombudsman un raisonnement adéquat basé sur les politiques se trouve dans les Directives ministérielles, lesquelles précisent que le Bureau est indépendant de la direction du ministère et de la chaîne de commandement des Forces armées canadiennes9. L’indépendance administrative et opérationnelle est cruciale, car l’Ombudsman ne devrait pas être contrôlé, dans les faits ou en apparence, par l’organisation sur laquelle il a le mandat d’enquêter et de faire des rapports.

Nous recommandons que ce raisonnement, ainsi que la relation unique entre le ministère et l’Ombudsman, soit reconnus par tous les intervenants actuels et serve de base pour l’octroi futur des délégations de pouvoirs. 

Même si l’autorité juridique des sous-ministres successifs ne peut être entravée, nous recommandons qu’une DOAD à l’appui des Directives ministérielles soit rédigée de façon à reconnaître les principes du rôle d’ombudsman et le raisonnement qui motivera l’octroi des pouvoirs fonctionnels de l’Ombudsman, y compris la nécessité d’avoir des instruments de délégation distincts et des audits périodiques10

Recommandation 1

Nous recommandons la rédaction et publication d’un article des Directives et ordonnances administratives de la défense qui appuie les Directives ministérielles, reconnaissant les principes d’ombudsman et énonçant le raisonnement qui guidera la délégation des pouvoirs à l’Ombudsman par les sous-ministres successifs.

Délégation stable attachée au poste et non à la personne

Avant que les fonctionnaires puissent exercer les pouvoirs délégués à leur poste, ils doivent suivre la formation ministérielle, obtenir une attestation et être désignés par leur supérieur.

Dans le cas où une personne titulaire de pouvoirs démontre constamment une mauvaise interprétation ou le non-respect des règles, il est possible de s’attaquer au problème sans nuire au bon fonctionnement du Bureau. Par exemple, les mesures prises envers la personne peuvent aller d’une formation, notamment une requalification, au retrait de ses désignations. Toutefois, on ne devrait pas toucher aux délégations ou aux seuils dont fait l’objet le Bureau.

Lorsqu’il y a des lacunes dans la façon dont une personne exerce ses pouvoirs délégués, nous recommandons la prise de mesures appropriées.

Recommandation 2

Nous recommandons, lorsqu’un audit révèle qu’un membre du personnel de l’Ombudsman a mal exercé les pouvoirs délégués, que l’Ombudsman prenne les mesures correctives requises en consultation avec le sous-ministre et avec son accord. Ces mesures peuvent notamment comprendre le retrait de la désignation par le sous-ministre.

Instruments distincts pour le Bureau de l’Ombudsman

Le format des instruments de délégation pour le Bureau de l’Ombudsman, concernant les pouvoirs en finances et en ressources humaines, a changé au fil des ans. Tandis qu’initialement, les instruments de délégation étaient propres au Bureau, on les a graduellement intégrés aux matrices ministérielles. Certains pouvoirs se trouvent encore dans des lettres et procès-verbaux tandis que d’autres ont été pleinement intégrés aux instruments ministériels, ce qui a causé beaucoup de confusion et d’incertitude. Cela a aussi entraîné des difficultés opérationnelles très concrètes.

Avant 2015, l’instrument de délégation des pouvoirs financiers du bureau de l’Ombudsman était indépendant. Il spécifiait les postes auxquels on octroyait les délégations, ainsi que les seuils financiers pour ces postes délégataires. En 2015, le Bureau de l’Ombudsman a été intégré à la matrice de délégation des pouvoirs financiers du ministère, ce qui a eu pour conséquence majeure, quoique peut-être involontaire, d’affecter la capacité de l’Ombudsman de prendre des décisions opérationnelles liées au fonctionnement du Bureau.

Les instruments de délégation des pouvoirs en ressources humaines et en relations de travail sont en quelque sorte plus complexes, car la délégation dépend de multiples sources législatives et exigences administratives. Par exemple, les pouvoirs de nomination des fonctionnaires (dotation) viennent de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique, par l’intermédiaire de Commission de la fonction publique, et sont octroyés aux administrateurs généraux qui peuvent les sous-déléguer à des postes au sein de leurs organisations. Si un administrateur général souhaite sous-déléguer des pouvoirs à une personne occupant des fonctions extérieures à l’organisation ou à la ligne hiérarchique directe de l’administrateur général, une entente particulière est requise. Le Bureau de l’Ombudsman a toujours fait l’objet d’une entente particulière permettant au sous-ministre de la Défense nationale de sous-déléguer à l’Ombudsman les pouvoirs de nomination au sein du Bureau et autres pouvoirs connexes11.

L’existence d’instruments indépendants et distincts des instruments du ministère comportait plusieurs avantages et assurait un degré de stabilité organisationnelle. Les instruments de délégation distincts représentaient une reconnaissance du statut d’indépendance de l’Ombudsman et de sa relation unique avec le sous-ministre. Ils isolaient le Bureau des changements aux délégations qui, bien qu’appropriés pour les hauts dirigeants du ministère, ne convenaient pas à l’Ombudsman qui est à la tête d’une organisation indépendante. Ces instruments distincts assuraient que tout changement aux délégations et ses répercussions potentielles sur les opérations allait être considéré et discuté avec l’Ombudsman.

L’intégration de l’Ombudsman aux matrices ministérielles a éliminé ces avantages et a en grande partie assimilé l’Ombudsman aux conseillers de niveau 1, dont les responsabilités, besoins opérationnels et voies hiérarchiques diffèrent.

Le moyen le plus efficace et facile de résoudre ces problèmes sans nuire aux intérêts du sous‑ministre serait d’établir pour l’Ombudsman des instruments de délégation distincts de ceux du ministère. Ainsi, on s’assurerait de tenir compte du statut unique de la relation au moment de faire l’examen des délégations. Cela créerait aussi la stabilité et favoriserait les discussions lorsque surviennent des circonstances exceptionnelles non anticipées au moment d’octroyer les délégations. 

Recommandation 3

Nous recommandons que les instruments de délégation pour le Bureau de l’Ombudsman soient indépendants et distincts de ceux du ministère, comme c’était le cas auparavant.

Audits et mesures correctives subséquentes

En accord avec l’approche axée sur les intérêts, le sous-ministre doit avoir l’assurance que les pouvoirs délégués au Bureau de l’Ombudsman sont bien exercés. Les audits périodiques depuis l’entrée en fonction de l’Ombudsman actuel ont démontré que le Bureau se conforme aux règles et assure une solide gestion financière. On s’attend à ce que les systèmes en place contiennent suffisamment de freins et contrepoids pour que soient détectées et résolues les éventuelles anomalies. Nous recommandons que les audits périodiques par le ministère se poursuivent et que les mesures correctives requises, le cas échéant, soient prises par le Bureau de l’Ombudsman12

Recommandation 4

Nous recommandons que l’Ombudsman et le sous-ministre concluent un protocole d’entente qui prévoit des audits périodiques par le ministère de l’exercice des pouvoirs délégués au Bureau de l’Ombudsman en matière de finances et de ressources humaines13. 


  1. L’audit a été entamé, en partie, à la suite d’allégations d’irrégularités administratives par un titulaire de charge publique du gouverneur en conseil.
  2. L’approche de laisser-faire a évolué en reconnaissance d’une disposition des Directives ministérielles comme quoi le Bureau de l’Ombudsman est indépendant de la gestion du ministère et de l’intention de promulguer une réglementation pour le Bureau.
  3. Les tableaux sont extraits des instruments de délégation et n’incluent pas l’ensemble des pouvoirs délégués à l’Ombudsman.
  4. Directives ministérielles, précité, note 3, alinéa 3(ii).
  5. Voir l’annexe B du présent rapport pour la DOAD proposée.
  6. Voir l’annexe C pour l’Instrument de délégation et de responsabilisation en matière de nomination (IDRN), les dispositions particulières à la sous-délégation et la délégation concernant les nominations du groupe EX.
  7. Les audits des dossiers administratifs du Bureau de l’Ombudsman par le ministère ne sont pas problématiques, pourvu qu’il n’y ait pas de problème de confidentialité des renseignements du plaignant. Les audits permettent l’examen des mesures administratives par un expert n’ayant pas participé à la transaction originale, afin de vérifier le respect des règles et pratiques exemplaires.
  8. Il faut noter que des PE ont déjà été établis concernant des audits financiers réguliers par le ministère.
Plan d'action – Délégation des pouvoirs financiers

Plan d'action

Délégation des pouvoirs financiers

Pour assurer l’indépendance réelle et perçue du Bureau de l’Ombudsman sur les plans administratif et opérationnel, il est essentiel que le Bureau possède tous les pouvoirs nécessaires au fonctionnement de l’organisation. La présente section décrit les principaux problèmes liés aux seuils des délégations de pouvoirs financiers et comprend des recommandations qui assureraient l’indépendance de l’Ombudsman en ce qui concerne la prise de décisions au sein de l’organisation.

Une ébauche de matrice de délégation des pouvoirs financiers est présentée à l’annexe D.

Processus budgétaire

Historiquement, le montant des allocations annuelles du Bureau de l’Ombudsman n’ont pas posé problème. De la création du Bureau en 1998 jusqu’en 2011, le Bureau s’est vu allouer automatiquement un budget de fonctionnement annuel tout juste en-deçà de six millions de dollars14.

Le Bureau a envoyé un premier plan d’activités au ministère en 2010 pour l’exercice 2011-2012, en réaction à une lettre d’appel ministérielle qui sommait l’Ombudsman d’agir, contrairement aux lettres d’appel précédentes qui étaient à titre d’information uniquement.

Premièrement, il est important de mentionner que l’obligation de soumettre un plan d’activités à l’examen et au contrôle financier du ministère est problématique pour une organisation indépendante qui relève du ministre et non du sous-ministre15.

Deuxièmement, l’allocation annuelle octroyée à l’Ombudsman par le ministère soulève des préoccupations relatives au principe d’indépendance, car les cordons de la bourse de l’Ombudsman sont tenus par une des organisations qu’il a le mandat de surveiller.

Cela ne veut pas dire que le ministère ne devrait pas faire de planification ou recevoir de soumission. Cependant, ces mesures devraient être à des fins de transparence et de reddition de compte plutôt qu’à des fins d’examen et de décision par le ministère.

Dans le budget demandé pour 2017-2018, nous demandions un financement accru en raison d’un plus grand volume de demandes des commettants. Même si le plan d’activités soumis au ministère par l’Ombudsman était entièrement justifié, il a d’abord été refusé16. Le budget a finalement été approuvé après des discussions entre l’Ombudsman et le sous-ministre17.

Néanmoins, le contrôle du budget par le ministère est potentiellement problématique, car cela donne un moyen au ministère d’influencer les processus de planification de l’Ombudsman, de remettre en question le bien-fondé des dépenses effectuées pour appliquer le mandat et, ultimement, de restreindre les activités de l’Ombudsman en refusant le budget soumis.

Recommandation 5

Nous recommandons que le plan d’activités de l’Ombudsman soit soumis et approuvé par le ministre de la Défense nationale, dont il relève, et que le projet de budget annuel pleinement justifié de l’Ombudsman soit consigné au ministère.

Seuils de passation de marchés

D’autres problèmes découlent de l’établissement des seuils des dépenses. Il est nécessaire pour l’Ombudsman que les pouvoirs délégués soient assortis de seuils adéquats pour une gestion indépendante du Bureau.

Avant 2015, les seuils de passation de marchés imposés à l’Ombudsman étaient considérablement supérieurs. Le tableau suivant illustre les changements dans certaines catégories des délégations de pouvoirs liés aux dépenses en contrats.

Prenons par exemple la passation de contrats de services. Règle générale, le premier geste est de déterminer si le service est disponible par moyen d’un accord d’approvisionnement ou d’une offre à commandes. Dans la négative, le délégataire peut présenter et gérer un contrat en respectant le seuil prévu. Si le contrat dépasse le seuil, c’est le SMA(Mat) qui a par défaut les pouvoirs de passation de marchés, avec le pouvoir décisionnel sur tous les aspects du contrat.

Ce processus est peut-être adéquat pour la plupart des contrats du ministère, mais pas dans le cas du Bureau de l’Ombudsman. Si le SMA(Mat) détient les pouvoirs sur les contrats de l’Ombudsman, il y a incursion dans la gestion indépendante du Bureau de l’Ombudsman et un possible conflit d’intérêts si le contrat est lié à une enquête sur le ministère.

En 2015, on a intégré le Bureau de l’Ombudsman à la matrice ministérielle en lui attribuant un statut équivalent à celui des conseillers de niveau 1, dont les responsabilités et voies hiérarchiques sont différentes. Cela a eu pour effet de réduire les seuils de dépenses et de retirer certains pouvoirs importants pour un processus décisionnel indépendant. Par exemple, le seuil de dépense de l’Ombudsman pour les contrats de services généraux (avec concurrence) est passé de 400 000 $ à 75 000 $. Ainsi, le SMA(Mat) devait agir comme autorité responsable des contrats de l’Ombudsman supérieurs au seuil de 75 000 $.

Pour contourner ce problème de gouvernance et préserver l’indépendance des décisions contractuelles, l’Ombudsman a obtenu que Services publics et Approvisionnement Canada (SPAC) agisse comme autorité responsable de deux contrats de grande valeur18.

Pour deux autres contrats, SPAC a refusé d’agir comme autorité responsable à cause de leur valeur relativement faible, même s’ils dépassaient le nouveau seuil des contrats de l’Ombudsman. Dans ces deux cas, l’Ombudsman a dû ajuster la portée des exigences et réduire le nombre de jours disponibles pour effectuer le travail, de façon à ce que la valeur des contrats ne dépasse pas le seuil de 75 000 $. Essentiellement, le seuil contractuel a affecté la capacité de l’Ombudsman de satisfaire ses besoins opérationnels.

Ce genre de problème ne risque pas d’arriver si les seuils contractuels imposés à l’Ombudsman sont suffisants. Avant 2015, les seuils contractuels étaient généralement appropriés aux activités quotidiennes du Bureau.

Nous recommandons que les montants soient ramenés, au minimum, aux montants en vigueur avant l’arrivée de la matrice intégrée en 2015. Exceptionnellement, les contrats dont la valeur dépasse le seuil de dépenses pourront être traités au cas par cas par l’Ombudsman et le ministre.

Recommandation 6

Nous recommandons que les seuils contractuels applicables au Bureau de l’Ombudsman soient rétablis au moins aux montants d’avant 2015.

Seuils applicables aux déplacements et aux activités d’accueil

L’Ombudsman se rend régulièrement dans les bases et escadres du pays pour rencontrer ses commettants dans le cadre de son mandat. Des déplacements sont aussi requis pour d’autres activités clés comme les enquêtes, la gestion des mentions d’honneur annuelles et les réunions du Comité consultatif de l’Ombudsman19. Normalement, les dépenses de l’Ombudsman affectées aux déplacements et à l’accueil comptent pour environ 20 % de l’allocation annuelle totale du Bureau.

Le sous-ministre a fixé le plafond des dépenses de déplacement et d’accueil pour le ministère à 2,1 millions de dollars. Les fonds sont alloués aux conseillers de niveau 1, notamment le Bureau de l’Ombudsman. Pour chaque exercice financier, le sous-ministre, en consultation avec le SMA(Fin), fixe les seuils des dépenses de déplacement et d’accueil en se fondant sur un examen des dépenses des exercices précédents et sur les plans de déplacement et d’accueil soumis pendant la période de planification des activités.

Encore une fois, le processus de détermination du seuil de déplacement et d’accueil pour les conseillers de niveau 1 relevant directement du sous-ministre est problématique pour l’Ombudsman, car il place le contrôle d’un aspect clé des activités de l’Ombudsman entre les mains du ministère.

Pour l’exercice 2015-2016, le seuil imposé à l’Ombudsman était grandement inférieur au montant soumis dans le plan d’activités de l’Ombudsman. Le seuil de l’Ombudsman a par la suite été augmenté pour refléter le plan, à la suite de discussions comme quoi ce seuil inférieur constituait une interférence déraisonnable avec les activités centrales du Bureau.

En 2017-2018, le seuil attribué à l’Ombudsman correspond exactement au seuil soumis dans les documents de planification. Même si la logique présentée lors des années précédentes a prévalu et que l’indépendance du Bureau de l’Ombudsman a été respectée par le ministère cette année, le problème demeure pour l’avenir. Le problème, dans le cas des seuils des dépenses de déplacement et d’accueil, est qu’ils limitent la souplesse de l’Ombudsman pour faire face aux enjeux qui surviennent en cours d’année.

L’intérêt du sous-ministre dans ce cas est de s’assurer qu’il y a transparence et reddition de comptes dans la gestion des finances du ministère et de s’assurer que le plafond pour l’ensemble du ministère est alloué adéquatement.

Nous recommandons que le seuil des dépenses de déplacement et d’accueil qui est soumis par le bureau l’Ombudsman soit approuvé, avec une marge additionnelle de 20 % pour faire face aux imprévus. La marge additionnelle sera absorbée dans l’allocation totale du Bureau de l’Ombudsman. Si cette marge est insuffisante pour faire face à un imprévu particulier, l’Ombudsman en discutera avec le ministre et le sous-ministre.

Recommandation 7

Nous recommandons ce qui suit :

  1. Que le seuil des dépenses de déplacement et d’accueil soumis par le Bureau de l’Ombudsman soit approuvé tel quel et qu’il soit entendu que la soumission comprend une marge pour les imprévus.
  2. Que le seuil des dépenses d’accueil approuvé tel que soumis par l’Ombudsman.
  3. Que les exceptions soient gérées au cas par cas par l’Ombudsman et le sous-ministre.

Déclaration du budget comme un article distinct

Les Directives ministérielles stipulent que le budget de l’Ombudsman doit faire l’objet d’un article distinct dans le budget principal des dépenses du ministère et doit être détaillé dans le rapport annuel produit par l’Ombudsman20. Cette pratique est importante parce qu’elle reconnaît que le Bureau de l’Ombudsman est une organisation distincte et elle informe les parlementaires des coûts de fonctionnement du Bureau21. Pour l’exercice 2017-2018, le coût relatif du Bureau de l’Ombudsman représente 0,037 % du budget annuel total de la défense.

L’Ombudsman remet chaque année au ministère des rapports sur les finances et activités du Bureau. Toutefois, en 2014, le ministère a mis fin à la pratique voulant que le budget de l’Ombudsman soit déclaré comme un article distinct.

Recommandation 8

Nous recommandons que le ministère rétablisse, conformément aux Directives ministérielles, la déclaration du budget annuel de l’Ombudsman comme un article distinct dans le budget principal des dépenses du ministère.


  1. De la mise sur pied du Bureau jusqu’en 2016, le budget annuel est demeuré relativement stable à environ 6 millions de dollars. En 2011, des compressions de 8 % ont eu lieu dans la foulée du plan d’action de réduction du déficit (PARD).
  2. Le processus en vigueur au ministère pour approuver le plan d’activités et l’allocation du budget conséquente est complexe. Il fait intervenir des groupes particuliers de gestion des ressources et au moins deux comités supérieurs de gestion/leadership qui examinent les soumissions en fonction des priorités de dépenses en défense. Les grandes organisations de niveau 1 (qui relèvent directement du chef d’état-major de la défense/sous-ministre) et certaines organisations de niveau 1 plus petites peuvent être invitées à présenter leurs plans d’activités aux deux comités, mais tous les plans d’activités écrits ne sont pas revus par les deux comités. Ce processus est inapproprié pour l’Ombudsman, car ses plans d’activités ne devraient pas être soumis à l’examen et à l’approbation des fonctionnaires des organisations pouvant être enquêtées par l’Ombudsman.
  3. Le plan d’activités de l’Ombudsman a été examiné et le financement additionnel demandé par l’Ombudsman n’a pas été approuvé au niveau de l’agent de programme. Le plan d’activités n’a pas été soumis aux comités du budget, car cette année-là, à part les grandes organisations de niveau 1, seuls les niveaux 1 de petite taille identifiés pour subir des compressions budgétaires ont vu leurs plans d’activités faire l’objet des discussions des comités.
  4. La demande de financement accru était justifiée par le nombre accru de demandes par les commettants. Notons que l’augmentation était de 1,4 million de dollars. De plus, l’approbation a été tardive, causant des difficultés opérationnelles au Bureau de l’Ombudsman.
  5. Cela fait référence au contrat pour un programme d’apprentissage et de perfectionnement, d’une valeur de 250 000 $, et au contrat concernant le groupe des commissionnaires, d’une valeur de 500 000 $.
  6. Le mandat requiert la mise sur pied d’un comité consultatif de l’Ombudsman. Voir les Directives ministérielles, précité, note 3, art. 39.
  7. Directives ministérielles, précité, note 3, art. 11.
  8. Le Budget principal des dépenses indique les dépenses des ministères, organismes et programmes, ainsi que la formulation proposée des conditions régissant les dépenses que le Parlement sera invité à approuver. L’information fournie dans le budget principal des dépenses est reproduite comme annexe de la Loi de crédits.
Plan d'action – Ressources humaines et relations de travail

Plan d'action

Ressources humaines et relations de travail

Les décisions cruciales sur la planification du travail, sur les postes et niveaux nécessaires pour accomplir le travail et sur les meilleurs candidats à un poste donné doivent être prises par la personne responsable de l’organisation et de la prestation de ses services. Tout aussi importantes sont les décisions sur la façon dont les gestionnaires et le personnel interagissent pour créer un milieu de travail équitable et productif.

Les pouvoirs en ressources humaines et en relations de travail qui sont nécessaires au fonctionnement d’une organisation viennent de diverses sources législatives et sont délégués ou sous-délégués à l’aide de divers instruments.

Peu importe l’instrument, les pouvoirs délégués à l’Ombudsman en matière de ressources humaines et de relations de travail n’ont pas été constants, l’instrument de mai 2015 ayant notamment marqué une restriction majeure de ces délégations. Cela a causé des difficultés à l’Ombudsman, particulièrement parce que cela implique de soumettre par défaut au désigné du sous-ministre les décisions en matière de relations de travail. En plus de miner l’autorité de l’Ombudsman envers son personnel, cette pratique est contraire au lien hiérarchique direct de l’Ombudsman avec le ministre de la Défense nationale et à l’indépendance de l’organisation.

Pouvoirs requis par l’Ombudsman

En principe, l’Ombudsman devrait posséder tous les pouvoirs pouvant être requis pour gérer une organisation gouvernementale indépendante. Cela doit être le point de départ

Cependant, certains pouvoirs ne seraient pas requis, vu que le Bureau de l’Ombudsman fait partie du cadre ministériel. Par exemple, l’Ombudsman n’aurait pas besoin qu’on lui délègue le pouvoir d’agir comme représentant du ministère lors de négociations avec des agents négociateurs22.

L’Ombudsman a seulement besoin des pouvoirs qui affectent l’embauche et la gestion de son propre personnel et la sollicitation de conseillers techniques et professionnels, au besoin, pour la tenue des activités de l’Ombudsman23. Les pouvoirs énoncés à l’annexe E du présent rapport sont ceux auxquels on s’attendrait pour que le dirigeant de toute organisation indépendante puisse prendre des décisions indépendantes.

Il convient de mentionner qu’un ensemble complet de pouvoirs délégués à l’Ombudsman n’empêche d’aucune façon la consultation du ministère en ce qui concerne les procédures et les pratiques exemplaires. De la même manière, ces pouvoirs ne restreignent aucunement la possibilité de conclure des protocoles d’entente pour obtenir de l’expertise non disponible à l’interne24.

Recommandation 9

Nous recommandons ce qui suit :

  1. Que les pouvoirs délégués et sous-délégués au Bureau de l’Ombudsman, le cas échéant, en matière de ressources humaines et de relations de travail, soient au minimum ramenés à ce qui prévalait avant 2015, plus particulièrement en ce qui concerne les pouvoirs énoncés à l’annexe E du présent rapport.
  2. Que l’Ombudsman et le sous-ministre concluent un protocole d’entente afin que les dossiers de ressources humaines et de relations de travail du Bureau de l’Ombudsman fassent l’objet d’audits périodiques par le ministère.
  3. Que lorsqu’un audit démontre la non-conformité du Bureau, les mesures correctives fassent l’objet de discussions et d’un accord entre le sous-ministre et l’Ombudsman.

Expertise interne en ressources humaines

Lors de la mise sur pied du Bureau de l’Ombudsman, les ressources humaines et les relations de travail étaient gérées à l’interne. En 2014, tandis que le bureau faisait l’objet d’un audit du Bureau du vérificateur général, l’Ombudsman actuel est entré en fonction et a effectué sa propre évaluation de la capacité de l’organisation d’exécuter son mandat. L’Ombudsman a déterminé que des économies d’échelle substantielles pouvaient être réalisées si le Bureau travaillait plus étroitement avec le ministère et avait accès à sa vaste expertise dans tous les aspects de la gestion des ressources humaines. L’Ombudsman a donc approché le ministère et a conclu une entente sur les niveaux de service d’une année renouvelable, dont toute modification nécessitait le consentement mutuel des deux parties. L’entente transférait aussi trois postes à durée indéterminée et leurs allocations salariales de l’Ombudsman au ministère.

Malheureusement, les économies d’échelle attendues ne se sont pas avérées : les normes de service n’ont pas été respectées, le Bureau n’a pas d’agent des ressources humaines connaissant ses besoins organisationnels et les retards qui en découlent ont eu une incidence négative sur les opérations et sur la gestion de l’enveloppe des traitements et salaires de l’Ombudsman. Une petite organisation comme le Bureau de l’Ombudsman a besoin de processus de dotation maniables et efficaces et d’un accès immédiat à des ressources désignés pour l’aider à résoudre les questions de ressources humaines.

Pour compliquer les choses davantage, en 2016, le ministère a annulé toutes ses ententes sur les niveaux de service pour favoriser une restructuration de la gestion de ses ressources humaines. Cette décision a été prise unilatéralement, malgré une disposition spécifique exigeant un accord mutuel pour toute modification. L’Ombudsman se retrouve maintenant sans entente écrite spécifique avec le ministère, sans expert interne désigné à temps plein et sans accès aux systèmes ministériels et avec des délais de service qui affectent son efficacité.

Une partie de la solution réside dans le rétablissement du poste PE-05 qui existait auparavant au Bureau de l’Ombudsman, avec un plein accès au Système de gestion des ressources humaines (SGRH) du ministère. Cela permettra au Bureau d’avoir le contrôle de ses propres processus de dotation et d’accroître sa capacité de réaction et sa souplesse. Cela éliminera les délais qui résultent d’un statut prioritaire moindre dans la liste de priorités du ministère.

Afin d’avoir les assurances nécessaires que les activités de dotation ont lieu dans le respect de la législation et des politiques, des audits périodiques de dossiers choisis devraient être menés par le ministère.

Recommandation 10

Nous recommandons que soit rétabli le poste d’agent des ressources humaines interne au Bureau de l’Ombudsman, avec un accès complet aux systèmes de ressources humaines pertinents du ministère.

Classification

Toutes les organisations évoluent en fonction de divers facteurs d’entreprise, sociaux, politiques et environnementaux. Afin de demeurer efficaces, elles doivent occasionnellement se restructurer, notamment réattribuer les responsabilités entre les différents postes. Cela a une incidence sur les ressources humaines et signifie que les descriptions de travail, structures hiérarchiques et classifications doivent parfois être réexaminées.

Bien entendu, il est dans l’intérêt du ministère de normaliser les descriptions de travail et d’assurer la cohérence des niveaux de classification des postes dont les fonctions sont semblables. Toutefois, pour que l’Ombudsman soit efficace, il faut reconnaître certaines distinctions et prendre des mesures en conséquence, même si le Bureau demeure dans le cadre administratif du ministère25.

En ce qui concerne la structure hiérarchique, la reddition de compte et les responsabilités des hauts fonctionnaires (notamment les descriptions de travail et niveaux de classification), les petites organisations ont inévitablement des besoins différents des grandes. Ce qui fonctionne pour une organisation de soixante personnes comme le Bureau de l’Ombudsman peut ne pas répondre aux besoins d’une organisation de cent mille personnes comme le ministère de la Défense nationale et vice-versa. En fait, la structure de l’Ombudsman est plutôt comparable aux agences gouvernementales et ministères de petite taille qu’au ministère de la Défense nationale.

En ce qui concerne les descriptions de travail et les niveaux de classification, le Bureau a des besoins très différents non seulement à cause de sa petite taille, mais aussi à cause de la nature unique du travail accompli. Il est absolument crucial que les décisions de classification ne soient pas imposées à l’Ombudsman en fonction d’un modèle qui est bon pour l’ensemble du ministère.

Les besoins en classification de l’Ombudsman sont insuffisants pour justifier l’octroi de ces pouvoirs et le développement d’une expertise à l’interne. Cependant, nous recommandons que le ministère s’efforce de répondre aux besoins de l’Ombudsman en s’inspirant d’autres petites organisations gouvernementales pour élaborer les descriptions de travail et niveaux de classification de l’Ombudsman, au besoin, plutôt qu’en retenant simplement les options génériques utilisées par le ministère.

Recommandation 11

Nous recommandons, lorsqu’une expertise en classification des ressources humaines pour les petites organisations est requise ou qu’une description de travail unique est nécessaire pour un poste donné au sein du Bureau de l’Ombudsman, que la question soit impartie aux Services partagés en ressources humaines offerts par Services publics et Approvisionnement Canada26.

Autorité finale en matière de griefs

Les griefs concernent habituellement l’interprétation des conditions d’emploi, notamment les dispositions de la convention collective. Le droit des employés de déposer un grief est inscrit dans la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral, et le processus de grief, dans les différentes conventions collectives. Le processus de grief compte habituellement trois instances, la première étant le superviseur immédiat de l’employé, la dernière étant souvent l’administrateur général de l’organisation ou son représentant autorisé.

Dans le cas du ministère de la Défense nationale, le sous-ministre a désigné le directeur général – Gestion du milieu de travail27. Avant 2015, le sous-ministre avait aussi désigné l’Ombudsman comme dernière instance du processus de grief pour les griefs déposés par des employés de son organisation28.

Cette désignation, qui était octroyée à l’Ombudsman depuis 14 ans, a été révoquée en 2015 malgré que le sous-ministre ait reconnu qu’elle était tout à fait conforme au cadre législatif. Le sous-ministre a déclaré que ce changement visait à aligner le processus applicable aux employés du Bureau avec celui qui est en place pour les autres employés du ministère. Cette logique entre en conflit direct avec les intérêts de l’Ombudsman en ce qui concerne la gestion indépendante de l’organisation, mine le leadership de l’Ombudsman dans la gestion quotidienne de son personnel et est incohérente avec le lien hiérarchique de l’Ombudsman avec le ministre de la Défense nationale.

Après des échanges écrits et des discussions, ce pouvoir délégué a été partiellement rétabli. Toutefois, dans sa formulation actuelle, la délégation est ambiguë et insuffisante pour répondre aux intérêts de l’Ombudsman décrits ci-dessous29.

Étant donné que le sous-ministre a déclaré que la désignation de l’Ombudsman comme autorité de dernière instance du processus de grief est conforme au cadre législatif, le rétablissement complet de la désignation devrait constituer une option acceptable. Néanmoins, afin d’assurer l’exercice des pouvoirs et d’éviter les conflits d’intérêts, une limite peut être ajoutée obligeant l’Ombudsman à se récuser lorsqu’un grief concerne ses propres gestes ou décisions. Dans un tel cas, l’autorité finale du processus de règlement de grief serait confiée à une tierce partie extérieure au cadre ministériel.

Les discussions préliminaires avec l’unité des relations de travail de Services publics et Approvisionnement Canada laissent entendre qu’elle est prête à jouer ce rôle au besoin30.

Recommandation 12

Nous recommandons ce qui suit :

  1. Que soit rétablie la désignation autorisant l’Ombudsman à agir en tant qu’autorité de dernière instance du processus de grief pour les employés du Bureau de l’Ombudsman.
  2. Que soit incluse une limite obligeant l’Ombudsman à se récuser si ses propres actions ou décisions font l’objet du grief.
  3. Qu’une tierce partie extérieure au cadre ministériel soit désignée comme autorité de dernière instance du processus de grief si les actions ou décisions de l’Ombudsman font l’objet du grief.

Système de gestion informelle des conflits

En vertu de la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral, les administrateurs généraux doivent consulter leurs agents négociateurs et mettre en place un système de gestion informelle des conflits (SGIC)31.

Quand la législation est entrée en vigueur en 2003, l’Ombudsman de l’époque a pris l’initiative de consulter le syndicat concerné afin d’établir pour le Bureau un système distinct de celui du ministère. L’Ombudsman a cherché un expert en la matière qui était en mesure de fournir les services au Bureau, car on reconnaissait que la petite taille du Bureau allait rendre difficile d’assurer aux employés un environnement confidentiel et sûr où ils allaient pouvoir régler leurs problèmes en milieu travail. On comprenait aussi que les principes d’indépendance et de confidentialité exigeaient que l’Ombudsman trouve une tierce partie neutre pour fournir le service, afin que les problèmes internes liés au milieu de travail ne soient pas soumis par défaut au ministère32.

Un protocole d’entente a été conclu avec le ministère de la Justice. Cela a été accompli sans délégation formelle et était tacitement accepté.

En 2015, l’Ombudsman actuel a renégocié le PE avec le ministère de la Justice et a depuis renouvelé le PE pour les exercices financiers suivants33.

Recommandation 13

Nous recommandons que le pouvoir de gérer les systèmes de gestion informelle des conflits applicables au Bureau de l’Ombudsman soit officiellement délégué à l’Ombudsman.

Prévention et résolution du harcèlement34

L’Ombudsman est délégataire du pouvoir de recevoir, d’administrer et de traiter les plaintes de harcèlement au sein du Bureau35. Ainsi, il a nommé un conseiller en harcèlement et emploie six conseillers en relations de travail qui ont tous suivi une formation officielle et obtenu une accréditation pour appliquer les politiques et procédures du ministère.

Même si cette délégation de pouvoir n’est pas problématique actuellement, les changements récents à la Politique sur la prévention et la résolution du harcèlement du ministère (DOAD 5012-0) et aux instructions de procédure connexes causent des difficultés au Bureau de l’Ombudsman. En vertu de la nouvelle procédure, le rôle du conseiller en harcèlement revient par défaut au SMA(RH-Civ), plus particulièrement agents des relations de travail (ARH), et ce, pour tous les employés civils36.

Les mêmes préoccupations concernant l’indépendance de l’organisation et le flou dans les liens hiérarchiques, décrits ci-dessus, s’appliquent au présent cas.

Par surcroît, la justification invoquée pour la réattribution des fonctions de conseiller en harcèlement aux agents des relations de travail est que les agents sont experts des enjeux de ressources humaines civiles et connaissent le cadre législatif et administratif entourant ces enjeux. La centralisation d’une fonction fonctionne peut-être dans une grande organisation, mais ce n’est pas le cas dans une petite organisation qui possède la même expertise. Le Bureau de l’Ombudsman possède à l’interne l’expertise juridique et les accréditations pour recevoir, administrer et traiter les plaintes de harcèlement conformément aux politiques du Conseil du Trésor et du ministère.

Cet exemple illustre à quel point, même lorsque les délégations sont valides, les procédures et politiques qui servent à appliquer la législation doivent parfois être adaptées au contexte du Bureau de l’Ombudsman37.

Recommandation 14

Nous recommandons que la Politique sur la prévention et la résolution du harcèlement (DOAD 5012-0) soit modifiée pour énoncer que le programme de prévention et de résolution du Bureau de l’Ombudsman est géré par le conseiller en harcèlement interne du Bureau de l’Ombudsman.


  1. Ministère de la Défense nationale, Instrument de délégation des pouvoirs en matière de ressources humaines pour les employés civils de la fonction publique du ministère de la Défense nationale, (Ottawa, 25 août 2016) à « pouvoirs en matière de relations de travail, de droits de la personne et de politiques », ligne 1 (instrument de délégation des pouvoirs en ressources humaines, 25 août 2016).
  2. Directives ministérielles, précité, note 3, art. 8-10.
  3. Des PE/contrats pour obtenir de l’expertise pourraient être conclus avec le ministère de la Défense nationale, d’autres ministères ou des entrepreneurs tiers, selon le cas.
  4. L’alinéa 11.1(1)(b) de la Loi sur la gestion des finances publiques, L.R.C. 1985, ch. F-11, donne au Conseil du Trésor la capacité de fournir la classification des postes dans la fonction publique. La Politique sur la classification du Conseil du Trésor donne la responsabilité aux administrateurs généraux, qui peuvent sous-déléguer leurs pouvoirs.
  5. Les Services partagés en ressources humaines de Services publiques et Approvisionnement Canada offrent un service aux agences et ministères de petite taille qui choisissent d’impartir leurs besoins en ressources humaines.
  6. Instrument de délégation des pouvoirs en ressources humaines, 25 août 2016, précité, note 23 à « Relations de travail, droits de la personne et activités politiques », ligne 5, note 19.
  7. Voir l’annexe F du présent rapport pour les anciens instruments de délégation de pouvoirs liés à l’autorité de dernière instance.
  8. Instrument de délégation des pouvoirs en ressources humaines, 25 août 2016, précité, note 23.
  9. Précité, note 27.
  10. La Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral s’appelait auparavant la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, art. 2. La loi a été modifiée et renommée en juin 2017.
  11. Instrument de délégation des pouvoirs en ressources humaines, 25 août 2016, précité, note 23.
  12. Conscient et respectueux du cadre régissant les délégations, l’Ombudsman a informé le ministre et le sous‑ministre de son intention de renégocier avec le ministère de la Justice et a fourni une copie de l’ébauche de protocole d’entente. Aucune réponse n’a suivi. Le PE a été signé en 2015 et renouvelé pour les exercices financiers suivants.
  13. Cela est fondé sur les politiques et directives du Conseil du Trésor, qui sont conçues pour aller au-delà de la Loi canadienne sur les droits de la personne.
  14. Instrument de délégation des pouvoirs en ressources humaines 2016, précité, note 23 à « Relations de travail, droits de la personne et pouvoirs politiques », ligne 11 (octroyer le pouvoir de recevoir et traiter les plaintes de harcèlement).
  15. Canada, Défense nationale et Forces armées canadiennes, Directives et ordonnances administratives de la défense (DOAD 5012-0) – Prévention et résolution du harcèlement, Ottawa, 2017. En ligne : http://www.forces.gc.ca/en/about-policies-standards-defence-admin-orders-directives-5000/5012-0.page.
  16. L’Ombudsman a pour pratique rigoureuse d’assurer sa conformité avec toutes les lois et politiques. Lorsque les politiques ou procédures du ministère posaient des difficultés pour le Bureau, l’Ombudsman en a avisé le ministre et le sous-ministre et a proposé des aménagements.
Plan d'action – Autres obligations et lois applicables à l'ensemble du gouvernement

Plan d'action

Autres obligations et lois applicables à l'ensemble du gouvernement

Lors de la mise sur pied du Bureau de l’Ombudsman, à l’exception des pouvoirs en finances et en ressources humaines requis pour la gestion quotidienne du Bureau, l’Ombudsman s’est vu octroyer les pleins pouvoirs pour agir en vertu de plusieurs lois dont la portée s’étend à l’ensemble du gouvernement.

Plaintes déposées en vertu de la Charte canadienne des droits de la personne

On a accordé à l’avocat général de l’Ombudsman les pleins pouvoirs pour recevoir les plaintes sur les droits de la personne concernant le Bureau et interagir directement avec la Commission des droits de la personne38. On considérait que cela était important pour que l’Ombudsman soit en mesure de traiter les plaintes sans intervention ou participation du Ministère dans la substance de dossiers confidentiels.

Ce pouvoir était détaillé et comprenait le droit de négocier et payer des règlements en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne et de consigner et déclarer les paiements aux comptes publics.

Ce pouvoir a été retiré à l’avocat général de l’Ombudsman dans l’instrument de délégation du 26 mai 2015. L’Ombudsman a envoyé des lettres pour s’opposer au retrait de ce pouvoir, expliquant son importance pour l’indépendance des opérations du Bureau et la protection des renseignements confidentiels des commettants.

Le plus récent instrument de délégation, daté du 25 août 2016, rétablit partiellement les pouvoirs détenus auparavant en matière de plaintes sur les droits de la personne39. Néanmoins, il exige une consultation avec la Direction générale – Gestion du milieu de travail. Par ailleurs, un avis juridique sur la responsabilité et le montant doit être obtenu auprès du Cabinet du conseiller juridique du MDN/des FAC, la considération d’un paiement à titre gracieux étant décidée par le conseiller juridique du MDN/des FAC. De plus, tout règlement contraire à l’opinion du conseiller juridique du MDN/des FAC doit être soumis à la décision du sous-ministre. Ce rétablissement partiel des pouvoirs est problématique, car le conseiller juridique du MDN/des FAC n’a pas accès aux dossiers de l’Ombudsman et n’est donc pas en position de donner des conseils sur la gestion et la résolution des plaintes. Mentionnons que l’Ombudsman a un service juridique interne qui donne ce type d’opinion, fondée sur des considérations parfois différentes de celles du ministère.

Jusqu’en novembre 2016, le débat était largement théorique parce qu’aucun dossier n’exigeait l’exercice de ces pouvoirs. Toutefois, une plainte en droits de la personne a maintenant été déposée à l’endroit du MDN, malgré que l’affaire soit liée à une enquête du Bureau de l’Ombudsman sur les actions des FAC. Le MDN et l’Ombudsman doivent maintenant réagir à une plainte logée auprès d’une organisation tierce, alors que les pouvoirs délégués à l’Ombudsman soient insuffisants, ambigus ou impraticables40.

Étant donné que le Bureau de l’Ombudsman possède une expertise juridique interne, nous recommandons que le pouvoir de traiter directement avec la Commission des droits de la personne soit pleinement rétabli, y compris le droit de négocier des règlements et d’approuver les paiements à titre gracieux.

Étant donné que l’Ombudsman fait partie du cadre ministériel, il est clairement dans l’intérêt du sous-ministre d’avoir les assurances que les plaintes sur les droits de la personne sont bien gérées, conformément au protocole du ministère. Nous recommandons donc que l’Ombudsman informe la Direction générale – Gestion du milieu de travail aux étapes clés du processus de gestion des plaintes.

Le sous-ministre a également un intérêt dans la gestion des passifs éventuels du ministère dans son ensemble. Nous recommandons donc que l’avocat général de l’Ombudsman consulte le conseiller juridique du MDN/des FAC en ce qui concerne le montant potentiel des dommages et établisse une marge aux fins de négociation et de règlement. 

Recommandation 15

Nous recommandons ce qui suit :

  1. Que soit pleinement rétabli le pouvoir de traiter directement avec la Commission canadienne des droits de la personne, y compris le droit de négocier des règlements et d’approuver les paiements à titre gracieux.
  2. Que l’Ombudsman informe la Direction générale – Gestion du milieu de travail aux étapes clés du processus de gestion des plaintes en droits de la personne.
  3. Que l’avocat général de l’Ombudsman consulte le conseiller juridique du MDN/des FAC concernant le montant potentiel des dommages et établisse une marge aux fins de négociation et de règlement des plaintes en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles

Lors de la création du Bureau de l’Ombudsman, les délégations de pouvoirs étaient faites en fonction de la législation, des politiques et des modèles d’affaires en place à l’époque. Depuis lors, sont entrées en vigueur de nouvelles lois dont on ne pouvait tenir compte lors des délégations originales. Néanmoins, le raisonnement voulant que le Bureau de l’Ombudsman soit indépendant de l’administration ministérielle s’applique toujours.

En 2005, la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles a été édictée pour protéger les fonctionnaires fédéraux qui divulguent des actes répréhensibles dans la fonction publique. En vertu de cette loi, le sous-ministre confie à un haut fonctionnaire du ministère la responsabilité de mettre en œuvre la loi et, plus précisément, de créer le Bureau de la divulgation interne pour les fonctionnaires du ministère. D’après la désignation ministérielle actuelle, une divulgation d’actes répréhensibles par un employé du Bureau de l’Ombudsman serait acheminée au Bureau de la divulgation interne et suivrait la procédure établie, laquelle peut comprendre une enquête sur le Bureau de l’Ombudsman par le responsable désigné du ministère41.

On outrepasse le principe d’indépendance si le Bureau de l’Ombudsman peut être assujetti au contrôle et à l’examen de l’organisation même qu’il est censé surveiller. Les mandats respectifs créent la possibilité de problèmes réels et perçus concernant la neutralité et l’impartialité des enquêtes, et ils compromettent la crédibilité des deux organisations.

Afin de préserver son indépendance face au ministère, il est important que l’Ombudsman ne soit pas sujet à un examen ou une enquête de la part du ministère. Néanmoins, il est aussi crucial de s’assurer que soient pleinement respectés les obligations du sous-ministre et les droits juridiques des employés, en vertu de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles.

Les discussions se poursuivent à ce sujet dans l’optique d’amender l’article pertinent des Directives et ordonnances administratives de la défense (DOAD 7024-1) afin de respecter les intérêts à la fois de l’Ombudsman et du sous-ministre42.

Nous recommandons que toute enquête menée en vertu de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles soit confiée à une tierce partie convenue par le ministère et l’Ombudsman; que l’Ombudsman soit tenu informé de la progression des enquêtes sur les membres de son personnel, comme le serait le sous-ministre; que toute mesure corrective soit prise par l’Ombudsman lorsque les membres de son personnel sont en cause.

Si la divulgation concerne un acte allégué de l’Ombudsman, l’enquête est alors soumise au gouverneur en conseil. 

Recommandation 16

Nous recommandons ce qui suit :

  1. Que soit amendée la DOAD 7024-1 pour que les enquêtes en vertu de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles relativement au Bureau de l’Ombudsman soient confiées à une tierce partie mutuellement acceptable.
  2. Que l’Ombudsman, en consultation avec le sous-ministre au besoin, prenne des mesures correctives lorsqu’une enquête révèle des actes répréhensibles de la part d’un employé de l’Ombudsman.
  3. Lorsque la divulgation concerne un acte allégué de l’Ombudsman, qu’une personne désignée par le gouverneur en conseil se charge de confier le dossier à une tierce partie neutre extérieure au cadre ministériel.

Délégations en matière d’AIPRP

Les pouvoirs requis pour administrer la Loi sur l’accès à l’information et la Loi sur la protection des renseignements personnels en ce qui concerne le Bureau de l’Ombudsman ont été délégués directement par le ministre de la Défense nationale en 2002. La raison derrière l’octroi d’une pleine autonomie était la nécessité de protéger les renseignements confidentiels des commettants et l’intégrité des dossiers d’enquête, ce qui serait impossible si le ministère était chargé de traiter les demandes en matière d’information.

Le Bureau de l’Ombudsman gère les obligations en vertu de ces lois de façon indépendante du ministère, et ce, de façon efficace selon un audit du Conseil du Trésor en 2013-2014.

Même si l’arrêté sur la délégation en ce qui concerne l’AIPRP est exhaustif, l’instrument date de 2002 et devrait être renouvelé43

Recommandation 17

Nous recommandons que les pouvoirs délégués à l’Ombudsman en matière d’AIPRP soient renouvelés par le ministre de la Défense nationale.


  1. Voir l’annexe F pour les pouvoirs antérieurs liés aux plaintes sur les droits de la personne.
  2. Instrument de délégation des pouvoirs en ressources humaines, 2016, précité, note 23 au préambule « Pouvoirs en matière de relations de travail, de droits de la personne et d’activités politiques », ligne 10, note 18.
  3. Les difficultés rencontrées dans la gestion concrète du dossier, en particulier le flou entourant les lignes de communication avec la Commission des droits de la personne, ont fait l’objet de négociations avec les différents intervenants internes et avec la Commission des droits de la personne, afin que le problème de gouvernance n’efface pas la substance de la plainte. Plus particulièrement, on a convenu que le problème de délégation serait mis de côté pour être traité ultérieurement.
  4. Cette situation de conflit intrinsèque est passée de la théorie à la pratique en 2011, lorsqu’on a accusé d’actes répréhensibles l’Ombudsman de l’époque. Le responsable désigné du Ministère a eu pour tâche d’enquêter sur les allégations. Aucun acte répréhensible n’a été trouvé, mais l’incident et l’évaluation du lieu de travail qui a suivi ont déclenché un débat sur le bien-fondé des enquêtes mutuelles et de la gouvernance en place. Une demande de divulgation adressée au Bureau est en cours, avec les mêmes problèmes non réglés.
  5. Canada, sous-ministre et chef d’état-major de la défense, DOAD 7024-1 – Mécanismes internes de divulgation par des employés du MDN d’actes répréhensibles en milieu de travail, 2016.
  6. L’examen par le Conseil du Trésor des rapports annuels de l’Ombudsman sur l’AIPRP recommande la mise à jour des délégations. Voir l’annexe G pour la proposition d’Arrêté sur la délégation de pouvoirs en vertu de la Loi sur l’accès à l’information et de la Loi sur la protection des renseignements personnels.
Conclusion

Conclusion

Jusqu’en 2015, le Bureau de l’Ombudsman avait les pouvoirs et les structures organisationnelles nécessaires qui permettaient au Bureau de fonctionner à l’abri des influences des organisations qu’il a le mandat de surveiller.

Les constatations du rapport du printemps 2015 du vérificateur général indiquaient clairement un manque de contrôles internes au Bureau de l’Ombudsman, ainsi que des lacunes au ministère quant à la surveillance de l’exercice des pouvoirs délégués. Dans son rapport, le vérificateur général constatait plusieurs cas de mauvaise gestion et recommandait que les têtes dirigeantes des deux organisations définissent et documentent la façon dont le Bureau de l’Ombudsman démontrerait que les contrôles internes sont efficaces et fonctionnent comme prévu, et dont le ministère surveillerait ces facteurs sans entraver l’indépendance opérationnelle de l’Ombudsman.

On n’a encore trouvé aucune solution acceptable pour les dirigeants du ministère et du Bureau, malgré que les contrôles internes institués par l’Ombudsman soient maintenant en place et que les audits du ministère aient confirmé que le Bureau applique les règles.

Une législation qui entérinerait la permanence et l’indépendance du Bureau est la solution. Vu l’absence d’appétit politique pour une telle législation, nous proposons le présent plan d’action comme une manière de rendre fonctionnelle une structure imparfaite. Les recommandations détaillées décrites dans ce plan d’action se veulent une solution de rechange pratique à la législation et indiquent une marche à suivre qui tient compte des intérêts des divers intervenants.

Liste des recommandations

Liste des recommandations

Nous recommandons ce qui suit :

Recommandation 1

Que soit rédigé et publié un article des Directives et ordonnances administratives de la défense qui appuie les Directives ministérielles, reconnaissant les principes d’ombudsman et énonçant le raisonnement qui guidera la délégation des pouvoirs à l’Ombudsman par les sous-ministres successifs.

Recommandation 2

Lorsqu’un audit révèle qu’un membre du personnel de l’Ombudsman a mal exercé les pouvoirs délégués, que l’Ombudsman prenne les mesures correctives requises en consultation avec le sous-ministre et avec son accord. Ces mesures peuvent notamment comprendre le retrait de la désignation par le sous-ministre.

Recommandation 3

Que les instruments de délégation pour le Bureau de l’Ombudsman soient indépendants et distincts de ceux du ministère, comme c’était le cas auparavant.

Recommandation 4

Que l’Ombudsman et le sous-ministre concluent un protocole d’entente qui prévoit des audits périodiques par le ministère de l’exercice des pouvoirs délégués au Bureau de l’Ombudsman en matière de finances et de ressources humaines.

Recommandation 5

Que le plan d’activités de l’Ombudsman soit soumis et approuvé par le ministre de la Défense nationale, dont il relève, et que le projet de budget annuel pleinement justifié de l’Ombudsman soit consigné au ministère.

Recommandation 6

Que les seuils contractuels applicables Bureau de l’Ombudsman soient rétablis au moins aux montants d’avant 2015.

Recommandation 7
  1. Que le seuil des dépenses de déplacement et d’accueil soumis par le Bureau de l’Ombudsman soit approuvé tel quel et qu’il soit entendu que la soumission comprend une marge pour les imprévus.
  2. Que le seuil des dépenses d’accueil soit approuvé tel que soumis par l’Ombudsman.
  3. Que les exceptions soient gérées au cas par cas par l’Ombudsman et le sous‑ministre.
Recommandation 8

Que le ministère rétablisse, conformément aux Directives ministérielles, la déclaration du budget annuel de l’Ombudsman comme un article distinct dans le budget principal des dépenses du ministère.

Recommandation 9
  1. Que les pouvoirs délégués et sous-délégués au Bureau de l’Ombudsman, le cas échéant, en matière de ressources humaines et de relations de travail, soient au minimum ramenés à ce qui prévalait avant 2015, plus particulièrement en ce qui concerne les pouvoirs énoncés à l’annexe E du présent rapport.
  2. Que l’Ombudsman et le sous-ministre concluent un protocole d’entente afin que les dossiers de ressources humaines et de relations de travail du Bureau de l’Ombudsman fassent l’objet d’audits périodiques par le ministère.
  3. Que lorsqu’un audit démontre la non-conformité du Bureau, les mesures correctives fassent l’objet de discussions et d’un accord entre le sous-ministre et l’Ombudsman.
Recommandation 10

Que soit rétabli le poste d’agent des ressources humaines interne au Bureau de l’Ombudsman, avec un accès complet aux systèmes de ressources humaines pertinents du ministère.

Recommandation 11

Lorsqu’une expertise en classification des ressources humaines pour les petites organisations est requise ou qu’une description de travail unique est nécessaire pour un poste donné au sein du Bureau de l’Ombudsman, que la question soit impartie aux Services partagés en ressources humaines offerts par Services publics et Approvisionnement Canada.

Recommandation 12
  1. Que soit rétablie la désignation autorisant l’Ombudsman à agir en tant qu’autorité de dernière instance du processus de grief pour les employés du Bureau de l’Ombudsman.
  2. Que soit incluse une limite obligeant l’Ombudsman à se récuser si ses propres actions ou décisions font l’objet du grief.
  3. Qu’une tierce partie extérieure au cadre ministériel soit désignée comme autorité de dernière instance du processus de grief si les actions ou décisions de l’Ombudsman font l’objet du grief.
Recommandation 13

Que le pouvoir de gérer les systèmes de gestion informelle des conflits applicables au Bureau de l’Ombudsman soit officiellement délégué à l’Ombudsman.

Recommandation 14

Que la Politique sur la prévention et la résolution du harcèlement (DAOD 5012-0) soit modifiée pour énoncer que le programme de prévention et de résolution du Bureau de l’Ombudsman est géré par le conseiller en harcèlement interne du Bureau de l’Ombudsman.

Recommandation 15
  1. Que soit pleinement rétabli le pouvoir de traiter directement avec la Commission canadienne des droits de la personne, y compris le droit de négocier des règlements et d’approuver les paiements à titre gracieux.
  2. Que l’Ombudsman informe la Direction générale – Gestion du milieu de travail aux étapes clés du processus de gestion des plaintes en droits de la personne.
  3. Que l’avocat général de l’Ombudsman consulte le conseiller juridique du MDN/des FAC concernant le montant potentiel des dommages et établisse une marge aux fins de négociation et de règlement des plaintes en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne.
Recommandation 16
  1. Que soit amendée la DOAD 7024-1 pour que les enquêtes en vertu de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles relativement au Bureau de l’Ombudsman soient confiées à une tierce partie mutuellement acceptable.
  2. Que l’Ombudsman, en consultation avec le sous-ministre au besoin, prenne des mesures correctives lorsqu’une enquête révèle des actes répréhensibles de la part d’un employé de l’Ombudsman.
  3. Lorsque la divulgation concerne un acte allégué de l’Ombudsman, qu’une personne désignée par le gouverneur en conseil se charge de confier le dossier à une tierce partie neutre extérieure au cadre ministériel.
Recommandation 17

Que les pouvoirs délégués à l’Ombudsman en matière d’AIPRP soient renouvelés par le ministre de la Défense nationale.

 


 

Annexe A - Principes d’ombudsman Annexe B - Ajout proposé aux directives et ordonnances administratives de la défense Annexe C - Documents existants sur les pouvoirs de nomination Annexe D - Matrice financière proposée Annexe E - 0. Page de signature Annexe E - 1.1. Page de couverture pour relations de travail, droits de la personne et activités politiques Annexe E - 1.2. Instrument de délégation des pouvoirs en matière de relations de travail, de droits de la personne et d’activités politiques Annexe E - 2.1. Page de couverture pour gestion des cadres supérieurs Annexe E - 2.2. Instrument de délégation des pouvoirs de gestion des cadres Annexe E - 3.1. Page de couverture pour griefs de classification Annexe E - 3.2. Instrument de délégation des pouvoirs en matière de classification Annexe E - 4. Instrument de délégation de pouvoirs en matière de rémunération et avantages sociaux Annexe E - 5. Instrument de délégation des pouvoirs en matière de rendement, d’apprentissage, de perfectionnement et de reconnaissance des employés Annexe E - 6.1. Page de couverture pour stratégie de dotation Annexe E - 6.2. Modifications à l’instrument de délégation des pouvoirs en matière de dotation Annexe E - 7. Instrument de délégation des pouvoirs en matière de réaménagement des effectifs Annexe F - Désignations antérieures pour le dernier palier de grief et les droits de la personne Annexe G - Ordonnance de délégation de pouvoirs proposée à l’égard de la Loi sur l’accès à l’information et de la Loi sur la protection des renseignements personnels Annexe H - Réponse du ministre de la Défense nationale
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