Un examen de la Base des Forces canadiennes Cold Lake (4e Escadre)

Juillet 2013

Équipe d’enquête:

Gilles Brunet

Normand Trépanier

 

Contexte

Après avoir reçu, entre 2009 et 2012, 21 plaintes de la part de membres des Forces canadiennes, d’employés du ministère de la Défense nationale et de familles installés à la Base des Forces canadiennes (BFC) Cold Lake, en Alberta, l’Ombudsman du ministère de la Défense nationale et des Forces canadiennes, Pierre Daigle, effectuait une visite de sensibilisation plus approfondie en mai 2012. L’Ombudsman a organisé quatre assemblées publiques, dont certaines ont été très émotives, et de multiples rencontres avec de hauts dirigeants de la base, des civils, des membres de famille et des membres des Forces canadiennes. Au cours de la visite, 30 autres plaintes ont été remises à l’équipe de l’Ombudsman.
 

L’Ombudsman a eu le sentiment que les préoccupations soulevées au cours de la visite de sensibilisation méritaient qu’une lettre soit immédiatement envoyée au ministre de la Défense nationale afin de l’informer de ce que l’équipe de la sensibilisation avait appris. Plusieurs semaines plus tard, l’Ombudsman l’informait que le Bureau procédait à un examen de la situation à la BFC Cold Lake.
 

Les préoccupations soulevées par les membres de la communauté de la BFC Cold Lake touchaient les domaines suivants :
 

  1. le coût de la vie élevé (économie locale)
     
  2. les conditions de logement
     
  3. le gel de l’indemnité de vie chère en région
     
  4. l’accès à des soins médicaux spécialisés pour les membres de famille
     

L’Ombudsman a dépêché à la BFC Cold Lake, au cours de la semaine du 5 novembre 2012, une équipe d’enquêteurs chargés de rencontrer les dirigeants de la base et des unités, le représentant local de l’Agence de logement des Forces canadiennes, des gens du Centre de ressources pour les familles des militaires, des militaires, des civils et des membres de famille. Des entrevues et des réunions ont également eu lieu avec la haute direction à Winnipeg (1re Division aérienne du Canada) et à Ottawa. L’équipe a obtenu une collaboration exceptionnelle au cours de l’enquête. 
 

Table de matières
 

Base des Forces canadiennes Cold Lake (4e Escadre)

La ville de Cold Lake est située à environ 300 km au nord‑est d’Edmonton, du côté sud des sables bitumineux de l’Athabasca et à la frontière nord des champs de pétrole lourd de l’Alberta. On y trouve, depuis les années 1950, l’une des bases de la force aérienne les plus importantes et les plus achalandées du pays. La BFC Cold Lake (4e Escadre) emploie environ 1 750 militaires et 450 civils. Plus de la moitié des membres des Forces canadiennes de la BFC Cold Lake est composée de soldats, de caporaux et de caporaux‑chefs.
 

Pendant des décennies, la base a été l’employeur le plus important de Cold Lake. Toutefois, d’après les données du recensement de 2012, l’industrie pétrolière et gazière compte actuellement un nombre légèrement supérieur de travailleurs. Le maire de la ville prévoit l’arrivée de 500 à 1 000 autres travailleurs de l’industrie au cours de l’été 2013. Malgré la construction et la mise en vente de nouveaux logements, le taux d’inoccupation d’unités locatives est parmi les plus bas au Canada (de 1 p. cent en octobre 2012)1, si bas que le Conseil municipal a mis sur pied, en avril 2013, un programme de subvention visant à inciter les promoteurs immobiliers à construire des résidences locatives (sur une période de cinq ans).
 

Sujets de préoccupation

Coût de la vie

Les problèmes en lien avec le coût de la vie élevé à Cold Lake, causés en grande partie par la croissance de l’industrie pétrolière et gazière, ont été soulevés à chacune des réunions et des rencontres qui ont eu lieu au cours de la visite de l’Ombudsman. L’économie locale a fait l’objet d’une croissance rapide ces dernières années, notamment en ce qui a trait aux salaires du secteur privé et au coût de nombreux biens et services. La population a également augmenté de 20,9 p. cent depuis 2006.2 On a même comparé la ville de Cold Lake, à plus petite échelle, à celle de Fort McMurray.
 

Les membres des Forces canadiennes de la BFC Cold Lake et leur famille ont indiqué à l’Ombudsman et à son personnel que leur qualité de vie s'est nettement dégradée, en particulier si on la compare à celle de bases semblables au pays. En fait, un certain nombre de militaires ont mentionné à l’Ombudsman devoir occuper deux emplois à temps partiel, ou plus, pour joindre les deux bouts. Des familles ont déclaré ne plus pouvoir se payer les services du téléphone, du câble ou d’Internet. D’autres ont affirmé avoir dû vendre des effets personnels précieux, ne pas pouvoir inscrire leurs enfants au hockey ou à d’autres activités, puiser dans leur régime enregistré d'épargne‑retraite (REER) et même déclarer faillite pour respecter leurs obligations financières.
 

Les hauts dirigeants interrogés ont été unanimes sur le fait que nombre de militaires occupaient un deuxième emploi, non pas pour améliorer leur mode de vie, mais bien pour satisfaire aux besoins fondamentaux de la vie quotidienne. Le deuxième emploi entraîne un manque de temps avec la famille, une fatigue grandissante et une diminution accentuée de la qualité de vie dans son ensemble. Une importante unité opérationnelle a confirmé que 35 p. cent de son personnel occupait un deuxième emploi.
 

Le coût de la vie est l’une des causes de l’augmentation du taux d’attrition à la BFC Cold Lake. En 2012, le taux des libérations se situait à 8,3 p. cent et devrait monter à 12 ou 13 p. cent en 2013. Il se peut également que les militaires choisissent de prendre leur retraite ou de quitter les Forces canadiennes dans le but d’éviter une affectation à la BFC Cold Lake. 

 
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Logement

L’Agence de logement des Forces canadiennes (ALFC) gère le parc d’unités de logement résidentiel (ULR) pour les Forces canadiennes. Elle attribue des logements aux militaires et à leur famille, offre des services d’entretien et de réparation et administre le système de loyer. L’ALFC gère et entretient un portefeuille national d’environ 12 492 logements répartis entre 32 emplacements à l’échelle du Canada. Le bureau de l’ALFC de la 4e Escadre Cold Lake gère un portefeuille de 854 habitations vieilles de 60 ans.
 

C’est la Société canadienne d'hypothèques et de logement (SCHL) qui détermine, sur une base annuelle, la valeur de base du gîte (loyer) des logements des Forces canadiennes. Elle établit cette valeur en comparant les logements de tous les emplacements des Forces canadiennes à ceux des marchés locaux. Les évaluateurs de la SCHL déterminent le niveau de similitude ou de différence entre certaines unités de logement militaires et des unités locatives similaires en tenant compte de divers éléments comme le type, la dimension, l’âge et l’état général de la maison ainsi que l’accès à des commodités. Notons que les unités locatives de la BFC Cold Lake sont plus nombreuses que celles situées à l’extérieur de la base dans un rapport approximatif de 2,7 à 1.
 

Le loyer moyen d’une ULR militaire de trois chambres à coucher à la BFC Cold Lake s’élevait, au cours de l’AF 2012‑2013, à 1 032 $ par mois, soit approximativement deux fois le loyer du même type d’hébergement à la BFC Bagotville, au Québec (557 $), et à la BFC Greenwood, en Nouvelle‑Écosse (542 $), deux bases aériennes similaires au plan opérationnel. 
 

Chaque année, l’ALFC évalue l’état des logements de son portefeuille de logements. En juin 2012, le Centre de services de logement de l’ALFC de la 4e Escadre Cold Lake terminait l’évaluation de 853 des 854 unités de logement.3 
 

  • 2,1 p. cent des logements (18) ont été jugés « bons » par rapport à la moyenne nationale de 5 p. cent.
     
  • 56,97 p. cent des logements (486) ont été jugés « moyens » par rapport à la moyenne nationale de 64,2 p. cent.
     
  • 40,91 p. cent des logements (349) ont été jugés « médiocres » par rapport à la moyenne nationale de 29 p. cent.
     

Notons que, dans le cas de 828 unités de logement, des étiquettes d’avertissement ont été apposées à la trappe du grenier et à la porte d’accès de mur bas (le cas échéant), informant les occupants de la possibilité d’amiante dans l’isolant de vermiculite.4
 

Conformément aux lignes directrices de Santé Canada, tous les greniers, les luminaires, les types de pénétration et les tuyaux de plomberie ont été scellés avec un calfeutrage spécial. Les boîtes d’éclairage électrique ont été remplies avec de la mousse. Les greniers ont été calfeutrés et leur accès vissé en place. Les occupants de ces unités doivent s’engager, par une signature, de ne pas briser les sceaux.
 

Outre les problèmes d’amiante et de vermiculite, 640 unités de logement affichent des étiquettes d’avertissement pour les prises de courant non mises à la terre et l’eau doit couler dans environ 250 résidences, de novembre à avril, enfin d’empêcher la tuyauterie de geler.
 

Bien que la question de l’amiante soit traitée conformément aux directives de Santé Canada, les familles des Forces canadiennes se disent hautement préoccupées par la présence éventuelle de ce produit dans leurs vieux logements.
 

Les loyers de Cold Lake devaient augmenter de 8,8 p. cent à compter du 1er avril 2013. Toutefois, le ministre de la Défense nationale annonçait, le 30 décembre 2012, une diminution de 10 p. cent de la hausse proposée du loyer des logements militaires à Cold Lake. Cette diminution représente une réduction nette de 1,2 p. cent du coût du loyer pour l’année financière 2013‑2014.
 

Le ministre de la Défense nationale a également annoncé une limite de 2,2 p. cent à l’augmentation des loyers, partout au Canada, pour les soldats des catégories de prime de rendement 1 et 2 et les élèves‑officiers des Forces canadiennes. Cette annonce touche 293 soldats de la BFC Cold Lake.
 

Les représentants de l’ALFC ont dit aux enquêteurs que les taux de location allaient être calculés, comme d’habitude, en fonction de l’année financière 2014‑2015. La hausse du loyer ne sera pas calculée en fonction de la réduction de 10 p. cent de 2013‑2014. En conséquence, il se peut que les loyers de la région subissent une augmentation importante. À titre d’exemple, si l’évaluation annuelle révèle une hausse de 5 p. cent du loyer en 2014‑2015, cette hausse s’ajoutera au pourcentage prévu de 8,8 p. cent à l’origine, ce qui donnera une augmentation totale de 13,8 p. cent. C’est à Cold Lake que se trouvent les loyers les plus élevés de toutes les bases aériennes du pays.
 

L’ALFC est également responsable de la préparation d’un plan de réfection pour chaque base. Notons que les commandants d’armée (Armée de terre, Marine et Force aérienne) ont peu d’influence sur le processus de planification, notamment l’établissement des priorités, le niveau des loyers, les normes régissant les logements et les réinvestissements, et qu’ils sont souvent consultés et informés trop tard dans le processus pour influencer les résultats.
 

Bien que le coût du loyer ait été l’élément le plus important soulevé par la majorité des militaires, le service à la clientèle de l’ALFC a également fait l’objet de plaintes. Ainsi, pendant leur séjour à la BFC Cold Lake, les enquêteurs de l’Ombudsman ont reçu un certain nombre de plaintes liées aux services offerts par l’ALFC. Certaines personnes ont indiqué que, dès qu’une réparation ou une rénovation est effectuée, le loyer du logement en question est augmenté. Elles estiment que cette façon d'agir est injuste étant donné que les réparations ou les rénovations ne servent qu’à adapter l’unité de logement aux normes du jour. Nombre de personnes ont indiqué qu’elles refusent ces rénovations parce qu’elles n’ont pas les moyens de subir dans l’immédiat une augmentation de loyer.
 

Le gestionnaire de l’ALFC et ceux qui demeurent dans les ULR ont clairement expliqué combien il est difficile d’attirer des entrepreneurs pour exécuter des travaux dans les logements des Forces canadiennes à cet endroit. De nombreux entrepreneurs ont choisi de travailler pour l’industrie pétrolière parce qu’ils reçoivent beaucoup plus d’argent que ce que le gouvernement fédéral peut leur offrir. Dans certains cas, les entrepreneurs estiment que ça ne vaut la peine de se rendre à la BFC Cold Lake que s’ils ont plusieurs travaux à exécuter. La force du contexte économique dans la région de Cold Lake a également des répercussions sur le coût de la main‑d’œuvre. À titre d’exemple, le gestionnaire de l’ALFC a indiqué aux enquêteurs que son bureau paie un plombier 95 $ l’heure alors que les appels de service pour un plombier à Cold Lake même sont de 200 $ l’heure.      
 

Nota : Il convient de noter que l’ALFC a fourni à l’équipe d’enquête une nouvelle évaluation provisoire de l'état des ULR le 2 juin 2013. L'information est nettement différente de celle utilisée au cours des trois dernières années par l'Agence, information fournie au personnel de l'Ombudsman par le chef de la direction de l'ALFC le 25 février 2013. Les données provisoires datent de mars 2013, mais elles n'ont pas été finalisées.
 

Les données provisoires laissent entendre que 317 ULR à la BFC Cold Lake sont passées du statut de médiocre à moyen. Cette information doit être vérifiée, car elle ne concorde pas avec les évaluations et les informations fournies à l'équipe d'enquête par les intervenants sur le terrain.
 

Étant donné que le rapport a déjà été diffusé aux intervenants internes à des fins de consultation, la décision a été prise de conserver les données existantes pour le présent rapport. De toute façon, les données provisoires n’apporteraient pas de changements aux conclusions et recommandations de fond.
 

Indemnité de vie chère en région

Au cours des rencontres et des assemblées publiques tenues à la BFC Cold Lake, un nombre important de membres des Forces canadiennes ont soulevé la question de l’indemnité de vie chère en région (IVCR).
 

L’IVCR, mise en place le 1er avril 2000, est un mécanisme visant à stabiliser les écarts régionaux du coût de la vie des membres des Forces canadiennes et de leur famille en service au Canada. L’IVCR, une indemnité imposable, a été instaurée à Cold Lake le 1er juillet 2007 à cause de la hausse du coût de la vie dans la région. Le montant actuel de l’IVCR pour la région de Cold Lake est de 319 $ par mois.
 

Nombreux sont ceux qui ont souligné et soulignent encore que le taux d’IVCR de Cold Lake ne reflète pas adéquatement ni ne compense le coût de la vie élevé et le manque de services dans la collectivité, comparativement à d’autres régions. À Edmonton, là où les membres des Forces canadiennes et leur famille ont un meilleur accès à des logements, à des services et à des soins médicaux abordables, les militaires reçoivent 684 $ par mois, plus de deux fois le taux de Cold Lake.
 

On annonçait, dans un message général des Forces canadiennes (CANFORGEN) diffusé en avril 2010, que les taux d’IVCR étaient gelés jusqu’à nouvel ordre et qu’ils allaient demeurer au niveau de 2009‑2010. Le Directeur général – Rémunération et avantages sociaux a informé l’Ombudsman qu’à la suite du gel, la mise en œuvre d’une nouvelle méthode et d’un nouveau plan a été soumise à l’approbation du Secrétariat du Conseil du Trésor.    
 

Les membres de la chaîne de commandement et des Forces canadiennes ont exprimé avec force leurs frustrations à l’égard de l’IVCR. La perception du manque d’uniformité dans son application et l’incapacité à expliquer la méthode utilisée pour son calcul ont entraîné scepticisme et frustration chez les militaires.
 

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Soins médicaux spécialisés pour les familles

Au cours de la visite de l’Ombudsman à la 4e Escadre, un certain nombre de membres de la communauté militaire de Cold Lake ont souligné les difficultés rencontrées relativement à l’accès à des soins médicaux spécialisés. Bien que l’Escadre dispose d’une clinique qui répond aux problèmes médicaux courants des membres de famille de militaires, tous les autres soins sont dirigés à Edmonton et à d’autres collectivités situées à au moins 122 km. La même chose s’applique aux membres des Forces canadiennes.
 

La 4e Escadre Cold Lake est considérée comme une unité semi‑isolée, mais sur le plan des soins médicaux, comme une unité isolée. Cela signifie que les personnes à charge des membres des Forces canadiennes doivent subir un examen médical avant l’affectation d’un militaire à la 4e Escadre afin de s’assurer que l’emplacement dispose du matériel nécessaire pour leur offrir les soins nécessaires.
 

En janvier 2010, la chaîne de commandement de la 4e Escadre concluait un marché avec un fournisseur de service civil et ouvrait la Clinique médicale Medley. Cette clinique offre des soins primaires aux familles des Forces canadiennes parce qu'elles ont de la difficulté à avoir un accès normal à des fournisseurs de soins de santé. La Clinique médicale Medley, réservée aux familles des militaires, ne compte qu’un seul médecin5. Récemment, le maire de Cold Lake déclarait que la ville avait besoin de quatre médecins additionnels. Nombre de résidents utilisent l’urgence de l’hôpital pour des traitements médicaux. 
 

Les familles des militaires nécessitant des soins spécialisés non offerts à Cold Lake sont dirigées vers d’autres endroits par leur fournisseur de soins primaires. Selon les services requis, les familles peuvent devoir se rendre à Lloydminster (170 kilomètres), à Edmonton (292 kilomètres), à Saint-Paul (122 kilomètres) ou à Lac La Biche (150 kilomètres).
 

Des indemnités liées aux soins médicaux spécialisés sont offertes, mais limitées. Il se peut, en effet, qu’elles ne comprennent pas le remboursement de dépenses d’hébergement, de repas ou de faux frais lors d’un voyage d’une journée. Les personnes à charge se rendant à Edmonton pour raisons médicales ne sont normalement remboursées que pour les coûts de transport lorsqu’il leur est impossible d’utiliser le service de transport médical offert par la base. Cette navette part de Cold Lake à 8 h puis d’Edmonton à 16 h pour le trajet de retour (les rendez‑vous des patients sont entre 12 h 30 et 15 h). 
 

Si les familles de militaires ne peuvent revenir à Cold Lake la même journée, deux ULR situées à la BFC Edmonton peuvent les abriter à raison de 50 $ la nuitée. Si aucune ULR n’est libre, l’hébergement le plus économique sera remboursé. Les frais liés aux services médicaux ne sont pas automatiquement remboursés. Ils doivent d’abord être acquittés par le prestataire, puis justifiés par un médecin.
 

Des membres de famille de militaires ont dit aux enquêteurs de l’Ombudsman qu’il leur fallait plus de trois heures pour se rendre à un rendez‑vous avec un spécialiste, à Edmonton, et plus de trois heures pour en revenir. Certaines familles ont plus d’un enfant. Elles doivent donc tous les amener. Les membres de famille qui ont un emploi doivent prendre une journée de congé non rémunéré.
 

Mesures concernant les questions de qualité de vie

Le 15 février 2012, le commandant de la 4e Escadre envoyait une lettre à sa chaîne de commandement, dans laquelle il se disait préoccupé du coût de la vie élevé, du loyer élevé des logements militaires et de la « disparité » de la rémunération de ceux qui sont affectés à Cold Lake comparativement à d’autres bases au pays. Il précisait que ces disparités étaient la conséquence de la forte progression du secteur pétrolier et gazier et qu’elles allaient s’accentuer au cours des années à venir.
 

Afin de maintenir le moral et de stabiliser le coût de la vie, la chaîne de commandement de l’Escadre a pris un certain nombre de mesures pour aider ses militaires, notamment en ouvrant la Clinique médicale Medley et une école à charte. De plus, en février 2013, le ministre de la Défense nationale annonçait l’octroi d’un montant de 1,9 million de dollars pour un projet de service de garde qui permettra d'augmenter le nombre de places de 20 p. cent (100 places), en 2014, au Centre de ressources pour les familles des militaires.
 

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Conclusion

Au cours de l’enquête, la plupart des personnes interrogées, y compris les dirigeants de tous les niveaux, considéraient que le coût de la vie élevé dans la région de Cold Lake était un problème sérieux. Ils ont également insisté sur le fait que cette situation a des répercussions négatives sur la qualité de vie des membres des Forces canadiennes et de leur famille affectés à cet endroit, en particulier sur les militaires de niveau subalterne.
 

On a indiqué aux enquêteurs qu’un grand nombre de militaires de la BFC Cold Lake occupent un deuxième emploi. Une importante unité opérationnelle a confirmé que 35 p. cent de ses membres occupaient un deuxième emploi pour arriver à joindre les deux bouts. Cette pression financière incite des membres des Forces canadiennes expérimentés de la BFC Cold Lake à quitter les forces armées et à se trouver un emploi ailleurs. De plus, un nombre important de militaires quittent les Forces canadiennes ou prennent leur retraite afin d’éviter une affectation à Cold Lake. La perte de militaires expérimentés entraîne de nombreuses répercussions à l’échelle de l'organisation, notamment des coûts de formation supplémentaires.  
 

Dans le cas des militaires de niveau subalterne et de leur famille, la location d’une ULR est la seule possibilité viable étant donné que les logements à l’extérieur de la base sont rares et très dispendieux. L’évaluation de l’état des logements à Cold Lake révèle clairement que le parc de logements de l’ALFC a un besoin urgent d’amélioration, soit par l’entremise de rénovations ou de la construction de nouveaux logements. À la BFC Cold Lake, 709 familles/militaires vivent dans des logements des Forces canadiennes dont l’état a été évalué de médiocre à moyen. Il n’existe aucun plan de réfection majeure du parc de logements à cet endroit. 
 

Un très fort pourcentage de membres des Forces canadiennes vit dans des ULR (44 p. cent à Cold Lake comparativement à la moyenne nationale qui se situe entre 15 et 18 p. cent). Les recettes que génèrent les ULR à Cold Lake ne sont pas réinvesties à 100 p. cent localement pour améliorer les logements militaires de qualité médiocre. Les commandants d’armée sont responsables de l’efficacité opérationnelle de leur base et de leurs formations, mais n’ont que très peu d’influence sur la gestion des ULR.
 

Dès que des améliorations sont apportées, le montant du loyer augmente, rendant ainsi une situation économique déjà difficile encore pire.
 

Les membres des Forces canadiennes sont rémunérés sur une échelle nationale plutôt qu’en fonction des différences économiques régionales. Le salaire moyen des caporaux et des soldats est inférieur à la moyenne nationale et à celle de l’Alberta. L’IVCR est le seul mécanisme dont disposent les Forces canadiennes pour réduire le coût de la vie élevé de certains secteurs géographiques du Canada. Étant donné que les militaires sont assujettis à des affectations d’un endroit à un autre, à la discrétion des Forces canadiennes, parfois à court préavis, le programme de l’IVCR vise à  « aider les membres des Forces canadiennes en compensant leurs dépenses à des endroits où le coût de la vie est considéré comme supérieur à la norme… »  
 

Les taux de l’IVCR sont gelés depuis 2010. Pendant la révision du programme, les Forces canadiennes utilisent encore les taux établis en 2009. Cela fait maintenant trois ans qu’une mesure temporaire a été mise en place. En conséquence, les membres des Forces canadiennes qui vivent dans des régions ayant connu une hausse du coût de la vie depuis 2008 et dont le loyer a fait l’objet de fortes augmentations n’ont pas reçu de hausses subséquentes de l’IVCR correspondant à cette réalité et sont confrontés à une situation financière désavantageuse.
 

Les membres des Forces canadiennes comprennent mal la méthodologie de l’IVCR, son application et sa révision. Le Ministère n’a pas fourni de justifications claires à propos du gel de l’IVCR. En outre, les Forces canadiennes n’ont pas transmis de mises à jour concluantes de la situation aux militaires ni aucune date de mise en œuvre de la nouvelle méthodologie depuis avril 2010.
 

L’incapacité à avoir accès à des services médicaux spécialisés ajoute aux problèmes de la qualité de vie à cet endroit. Les membres des Forces canadiennes et leur famille doivent payer de leur poche des services normalement disponibles à d’autres emplacements urbains des Forces canadiennes.
 

Même si la BFC Cold Lake s’efforce, dans la mesure du possible, d’effectuer certains remboursements, les règlements concernant les emplacements semi‑isolés et isolés ne touchent pas les indemnités relatives aux soins médicaux pour les familles.  
 

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Recommandations

Voici les neuf recommandations formulées afin de remédier aux problèmes soulevés dans le présent rapport :
 

  1. Sous la direction du SCT, rétablir immédiatement une IVCR qui reflète le contexte économique de Cold Lake.
     
  2. Mettre Cold Lake en priorité dans le cadre de la stratégie nationale relative aux ULR.  
     
  3. Mettre en place un programme de réfection efficace pour les ULR de Cold Lake.
     
  4. Donner un rôle plus important à la chaîne de commandement relativement à la prise de décisions sur les priorités, le niveau des loyers, les normes du logement et le réinvestissement.
     
  5. Revoir la mise en place d’une hausse de loyer maximale associée à l’amélioration des ULR.
     
  6. Synchroniser les rajustements locatifs des ULR avec les rajustements de l’IVCR.  
     
  7. Rendre les méthodes de calcul de l’IVCR plus transparentes et fournir des explications en langage clair.
     
  8. 8. Revoir et clarifier les indemnités relatives aux soins médicaux en lien avec les emplacements isolés et semi‑isolés.
     
  9. Établir un cadre stratégique permettant l’utilisation de ressources publiques pour améliorer le soutien aux membres des Forces canadiennes et à leur famille affectés dans des unités isolées et semi‑isolées. 
      

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Annexe A : Copie de la lettre du Ministre de la Défense nationale au bureau de l’Ombudsman, juillet 2013

 

Jul 05 2013
 

Monsieur Pierre Daigle
Ombudsman du ministère de la Défense nationale
et des Forces canadiennes
100, rue Metcalfe, 12e étage
Ottawa (Ontario)  K1P 5M1
 

Monsieur,
 

Je tiens à vous remercier de vous être réuni avec moi le 13 juin 2013 afin de discuter de votre rapport spécial intitulé « Un examen de la Base des Forces canadiennes Cold Lake ». Le rapport soulève une série de préoccupations que nous partageons tous deux au sujet des conditions de vie actuelles des militaires à Cold Lake, particulièrement en ce qui concerne le coût élevé de la vie, l’état des logements, le gel des indemnités différentielles de vie chère en région et l’accès aux soins médicaux spécialisés pour les familles.
 

Vous avez formulé des recommandations en vue de faire de Cold Lake une priorité dans le cadre de la stratégie nationale pour le logement résidentiel et d’établir un programme efficace de réfection les logements résidentiels à Cold Lake. Au cours de la dernière année, le Ministère a inscrit Cold Lake dans ses priorités, notamment en ce qui concerne le logement résidentiel et celui pour célibataires, qui ont été visés par certaines initiatives.
 

L’Agence de logement des Forces canadiennes et l’Aviation royale canadienne s’affairent à élaborer des plans d’investissement à court et à long terme, dont le premier consiste en une augmentation de 2, 25 M$ des investissements qu’avait prévu réaliser l’Agence au cours de la présente année financière. De plus, l’Aviation royale canadienne a lancé un nouveau projet de logements pour célibataires en vue de bâtir des logements modernes qui attireraient davantage les célibataires habitant en ce moment dans les logements résidentiels, ce qui libérerait les plus petits logements, soit les plus abordables, pour les familles. En outre, le 2 juillet dernier, j’ai annoncé certains investissements, dont celui d’une somme de 2,8 M$ afin de construire un nouveau logement, qui sera conçu et bâti de manière à satisfaire aux besoins de nos militaires et celui de 829 000 $ afin de rénover les fenêtres et le revêtement extérieur des logements résidentiels.
 

Je tiens bien compte de vos recommandations à accorder à la chaîne de commandement un rôle plus important dans le processus décisionnel concernant les priorités, les loyers, les normes de logement et le réinvestissement ainsi qu’à étudier la possibilité d’établir un plafond quant aux augmentations de loyer liées aux améliorations apportées aux divers logements. Le ministère de la Défense nationale a lancé la phase 2 de son étude sur les habitations, qui vise à établir un modèle global de prestations de services résidentiels. L’étude devrait entraîner des améliorations considérables pour les membres des Forces armées canadiennes habitant dans les logements résidentiels et leur famille ; or, il convient de noter qu’elle n’est pas encore terminée.
 

Je tiens également compte de vos recommandations à synchroniser les ajustements annuels apportés aux loyers et aux indemnités différentielles de vie chère en région ainsi qu’à améliorer la transparence quant au calcul de ces indemnités, notamment en assurant une communication en langage clair. Comme vous le savez déjà, le Conseil du Trésor est le ministère responsable de la rémunération et des avantages sociaux des Forces armées canadiennes, y compris les indemnités différentielles de vie chère en région. Le travail réalisé en collaboration avec le Secrétariat du Conseil du Trésor afin que les membres des Forces armées canadiennes touchent des indemnités différentielles de vie chère correspondant au coût de la vie dans leur région constitue une haute priorité pour le Ministère, et il est essentiel que ce dossier continue à avancer. Dès que cette question sera réglée, les membres des Forces armées canadiennes en seront informés.
 

En outre, le personnel du Chef – Personnel militaire se penche actuellement sur vos recommandations à réviser et clarifier les prestations pour soin médicaux ainsi qu’à établir un cadre de ressources publique afin d’augmenter le soutien offert aux membres des Forces armées canadiennes qui sont affectés dans des régions isoles ou semi-isolées et à leur famille. Le Chef – Personnel militaire s’est engagé à communiquer les résultats de son étude. Toutefois, je dois vous rappeler que la prestation de services de santé aux familles relève des compétences provinciales.
 

Je vous remercie grandement pour le travail que vous réalisez au nom des employés du ministère de la Défense nationale et des membres des Forces armées canadiennes, ainsi que leur famille, et c’est avec plaisir que je continuerai de travailler avec vous afin d’apporter des changements positifs.
 

Je vous prie d’agréer, Monsieur, l’expression de ma haute considération.
 

Peter MacKay
 

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Annexe B: Copie de la lettre du Chef d’état-major au bureau de l’Ombudsman, juin 2013

Le 14 juin 2013
 

Monsieur Pierre Daigle
Ombudsman
Bureau de l’Ombudsman
Défense nationale et Forces canadiennes
Édifice Urbandale
100, rue Metcalfe, 12e étage
Ottawa (Ontario) K1P 5M1
 

Monsieur,
 

Je vous remercie d’avoir pris le temps de rencontrer le Mgén Dave Millar et quelques‑uns des membres de son état‑major, le 27 mai 2013, afin de discuter de votre rapport spécial intitulé « Un examen de la base des Forces canadiennes Cold Lake ». Je n’ai pas été en mesure d’être présent, et je le regrette, mais je suis certain que la rencontre a été fructueuse.
 

Votre rapport soulève un certain nombre de préoccupations concernant la situation actuelle de la vie militaire à Cold Lake, particulièrement en ce qui a trait au coût de la vie, au logement, aux répercussions du gel de l’indemnité de vie chère en région et aux enjeux constants relatifs aux soins médicaux spécialisés. Bien que nous offrions d’intéressantes possibilités d’emploi à nos militaires en service, je sais pertinemment que nous devons nous attaquer aux problèmes perçus et concrets de la qualité de vie associés à la BFC Cold Lake en particulier, et au mode de vie militaire en général.
 

J’ai été heureux d’apprendre que vous avez souligné la nécessité de placer la BFC Cold Lake en priorité dans le cadre de la stratégie nationale en matière de logement militaire et qu’un programme de réfection des logements sera mis en place. L’ALFC travaille beaucoup avec l’ARC à élaborer des plans d’investissement à court et à long terme, à commencer par un investissement de 5,4 millions de dollars dès la présente année financière. L’ARC a également inclus un nouveau projet de logements pour célibataires à l’intérieur de son plan d’immobilisations à long terme, libérant ainsi des ULR plus petites et plus abordables pour les familles.
 

Je reconnais que vous souhaitiez davantage de contrôle et d’influence de la part de la chaîne de commandement militaire sur les priorités, les loyers, les normes domiciliaires et les investissements. Dans la phase 2 de l’étude sur les logements des FC, nous examinons comment nous pourrions fournir des services de logement plus souples. Il reste encore beaucoup à faire dans le cadre de cette étude. Toutefois, celle‑ci permettra, à long terme, d’améliorer de façon notable l’expérience des membres des Forces armées canadiennes (FAC) et de leurs familles en matière de logement militaire.
 

Je comprends que vous recommandiez que le calcul de l’IVCR soit plus transparent. Comme vous le savez, la résolution de la question de l’IVCR constitue une priorité de premier plan pour le Ministère. L’état‑major du DGRAS discute actuellement avec le Secrétariat du Conseil du Trésor (CT) d’un nouveau cadre d’IVCR qui s’harmonise mieux avec le niveau de référence particulier du CT associé à l’IVCR. Une fois mise en place par le ministre du CT, la nouvelle formule sera expliquée en détail aux membres des FAC.
 

L’état‑major du CPM s’occupe de votre recommandation de revoir et de clarifier les prestations pour soins médicaux associées aux emplacements isolés et semi‑isolés. Nous vous ferons part de nos conclusions dès nos travaux terminés.
 

Enfin, votre recommandation d’établir un cadre stratégique permettant l’utilisation de ressources publiques pour améliorer le soutien aux membres des Forces armées canadiennes, et à leurs familles, affectés dans des unités isolées et semi‑isolées mérite un examen plus approfondi. J’ai aussi demandé au CPM de déterminer quelles sont les ressources offertes à l’intérieur de nos programmes de biens non publics dans le cadre des services de bien‑être et de maintien du moral.
 

J’apprécie grandement le travail que vous et votre équipe abattez. J’espère que nous continuerons de dialoguer franchement et d’élaborer des mesures concrètes qui favoriseront un milieu de vie et de travail équitable et équilibré pour tous les membres des FAC et leurs familles. Dès que j’aurai reçu le rapport officiel, je vous enverrai une évaluation complète de notre plan relatif au traitement de vos recommandations.
 

Veuillez donc agréer, Monsieur, l’expression de mes sentiments distingués.
 

Général T.J. Lawson
 

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 Notes en fin de texte
 

1. Source SCHL
 

2. Recensement municipal de la ville de Cold Lake
 

3. Les définitions relatives à l’évaluation de l’état des ULR de l’ALFC sont les suivantes : 
 

Médiocre – Une unité dans un état médiocre pourrait constituer un risque pour la santé et la sécurité étant donné que la majorité des composantes ont dépassé leur cycle de vie. L’unité nécessite un investissement supplémentaire pour faire en sorte qu’elle puisse être occupée. De plus, l’unité devrait être considérée en priorité pour des travaux de réfection ou une activité d’aliénation.
 

Moyen – Une unité dans un état moyen fonctionne de façon satisfaisante. La majorité des composantes n’ont pas dépassé leur cycle de vie, mais devront être remplacées prochainement. Elles ne posent toutefois aucun risque pour la santé et la sécurité. L’unité nécessitera une gestion du cycle de vie et un entretien de routine de ses composantes, mais pourrait également être considérée pour des travaux de réfection.
 

Bon – Une unité en bon état comprend des composantes neuves ou presque neuves, et fonctionne à un niveau optimal. L’unité continuera de nécessiter une gestion du cycle de vie et un entretien de routine de ses composantes afin de la maintenir en bon état. Il est important de noter qu’une unité en bon état passera à un état moyen après cinq ans environ à cause du vieillissement de l’ULR.
 

Neuf – Une unité de logement construite ou entièrement rénovée au cours des cinq dernières années.
 

4. La vermiculite est un minerai semblable au mica, exploité partout dans le monde et utilisé dans une variété de produits commerciaux et de consommation pour ses propriétés isolantes et ignifuges. Le minerai qui suscite de l’inquiétude est celui extrait de la mine Libby, au Montana, entre 1920 et 1990. La vermiculite provenant de cette mine peut contenir de l’amiante amphibolique. La mine Libby approvisionnait la plus grande partie du marché mondial d'isolant de vermiculite. Les produits de vermiculite de la mine de Libby sont très peu utilisés depuis le milieu des années 1980 et ne sont plus disponibles au Canada depuis 1990. http://www.hc-sc.gc.ca/hl-vs/iyh-vsv/prod/insulation-isolant-fra.php

 

5.  Note d’information, 4e Escadre Cold Lake – Mise en place d’une clinique réservée aux personnes à charge des militaires, 15 janvier 2010

 

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