Mot d'ouverture : Comité permanent des anciens combattants de la Chambre des communes (ACVA)

Le texte prononcé fait foi

Le 13 février 2018
Par Gary Walbourne

 


 

Merci, Monsieur le Président, et merci aux membres du comité de m’avoir invité.

Mesdames et Messieurs, je suis dans la dernière année de mon mandat et c’est peut-être la dernière fois que je m’adresse au comité pour discuter de la transition de la vie militaire à la vie civile. En ce qui concerne la notion de transition « harmonieuse », je crois que le cycle d’examen constant fait plus de mal que de bien aux militaires actifs et retraités des Forces armées canadiennes.

Le comité étudie actuellement les « obstacles à la transition ». Ces obstacles sont bien connus. Des centaines de recommandations ont été faites par le comité et par d’autres, au fil des gouvernements successifs, afin de les éliminer. Des dizaines de recommandations ont été acceptées et mises en œuvre – mais ce ne fut pas le cas pour de nombreuses autres.

Chers membres du comité, en 2010, Anciens Combattants Canada, de concert avec Statistique Canada, a mené une étude majeure sur la transition. Une étude connexe avec Statistique Canada a également été effectuée en 2012. La publication des résultats d’une autre enquête de Statistique Canada menée auprès de 400 membres des Forces armées canadiennes, vétérans et leurs familles au sujet de « la transition à la vie civile et le bien-être après le service » est attendue ce mois-ci. Je vous garantis que ces résultats nous diront ce que nous savons déjà. Ça suffit!

Avant mon témoignage d’aujourd’hui, je me suis exprimé à ce sujet lors de témoignages précédents. Les points que je soulèverai aujourd’hui au sujet de la transition sont les mêmes que contiennent les rapports produits par mon bureau. Je crois qu’une bonne partie de ce que vous cherchez a déjà été présentée, par moi ou d’autres témoins.

Si, à la fin de mon témoignage d’aujourd’hui, je réussis à vous convaincre de vous concentrer dorénavant sur la mise en œuvre de ce qui a déjà fait l’objet d’études, alors j’aurai – nous aurons tous – bien servi nos militaires en transition. Ils n’ont pas besoin d’une autre étude sur la transition. Nous n’avons pas besoin d’une autre étude sur la transition. Nous savons ce qu’il faut faire. Il ne reste qu’à agir.

Donc, ce que je demande respectueusement aux membres de ce comité est que vous vous demandiez lucidement pourquoi – après des années d’études et de recommandations ignorées – la situation a si peu progressé.

Il faut rendre les dirigeants supérieurs imputables de la mise en œuvre des mesures – et non leur commander d’autres études.

On prête à peine foi aux recommandations que j’ai faites au gouvernement, notamment la recommandation suivante, toute simple, qui profiterait grandement à nos militaires en transition : autoriser les Forces armées canadiennes à déterminer si la blessure ou maladie d’une personne est attribuable au service militaire.

Comme je l’ai dit auparavant, les Forces armées canadiennes savent quand, où et comment un militaire devient malade ou blessé. Les Forces armées canadiennes devraient indiquer à Anciens Combattants Canada si la maladie ou blessure est attribuable au service militaire, et Anciens Combattants devrait accepter la conclusion.

Cette recommandation permettrait de réduire considérablement les délais dans l’octroi des prestations et services aux vétérans. J’ai formulé la recommandation en 2016. Anciens Combattants Canada et les Forces armées canadiennes se sont renvoyé cette patate chaude – trouvant des excuses très créatives pour expliquer pourquoi cela ne pouvait ou ne devait pas avoir lieu. La seule chose sur laquelle les deux organisations semblent s’entendre est le maintien coûte que coûte du statu quo. Le problème en est un de bureaucratie au service d’elle-même.

Ensemble, les deux comités parlementaires – anciens combattants et défense nationale – cumulent 14 études. 190 recommandations ont été formulées. Le bureau de l’Ombudsman des vétérans et mon bureau ont aussi fait des recommandations. Comme vous le savez tous, mes recommandations sont fondées sur des faits probants. Les faits ne s’inventent pas, ils se mettent en lumière. Fidèle à son mandat, notre bureau ne publie que des documents factuels. Afin de contribuer à l’amélioration durable de la communauté de la défense, nous prenons nos recherches très au sérieux. Partout au gouvernement, on encourage les décisions fondées sur des faits. Les partis politiques et les fonctionnaires s’engagent à respecter ce principe.

Cependant, je crains que la plupart des actions de notre gouvernement pour aider les militaires malades et blessés ne soient pas mesurées d’une manière facilement compréhensible. L’efficacité de divers programmes est tout simplement méconnue. Oui, les délais de traitement, les jugements et certains outils opérationnels de base font l’objet d’un certain suivi, mais on ne suit pas de près les programmes de réadaptation et autres indicateurs clés que contrôlerait n’importe quel administrateur d’avantages privé.

Ainsi, les militaires actifs et retraités des Forces armées canadiennes, les parlementaires, les sénateurs et le public canadien ont un portrait incomplet des enjeux. Pour que cela change, l’approche et les systèmes bureaucratiques doivent subir un changement fondamental. Nous avons besoin d’un processus de transition dont l’approche est fondée sur les faits, centrée sur les utilisateurs. Lorsque le système même est défectueux, on ne peut simplement tenter de pallier les lacunes d’efficacité çà et là.

Mesdames et Messieurs, j’ai été nommé en poste pour cinq ans – je connais la date exacte où je viderai mon bureau. De la même façon, en tant que parlementaires, vous avez une bonne idée du moment où vous irez en élection. Nous sommes ici parce que nous voulons apporter des changements positifs et durables pour nos commettants. La bureaucratie ne peut faire cela pour nous. Pour des changements véritables, je vous incite à faire pression sur les dirigeants supérieurs et à les tenir responsables de promesses mesurables. Je vous prie de poser un regard honnête sur certaines des solutions déjà suggérées et qui sont fondées sur des données probantes.

Bien sûr, il faut avoir des données à jour sur la transition et il est avantageux de connaître les meilleures pratiques et solutions qu’on peut adapter au contexte militaire canadien. Toutefois, je crains que les études successives et redondantes ne fassent que nourrir la bureaucratie. Qu’elles tirent d’affaire les dirigeants supérieurs. Une personne interrogée peut répondre : « nous étudions la question », tandis que les militaires malades et blessés continuent d’y perdre au change.

Comme l’Ombudsman des vétérans, j’ai commencé à publier des mini-rapports qui font état des progrès et des efforts réalisés en ce qui concerne la mise en œuvre des recommandations « acceptées ».

À mon humble avis, pour des résultats plus rapides et concrets, il est préférable de demander au gouvernement pourquoi les recommandations acceptées n’ont pas été mises en œuvre, plutôt que de commander d’autres études.

Le système actuel est dysfonctionnel, mais on peut le réparer. Je vous en prie, ne nuisez pas au processus de transition en barrant la route à l’action. Toutes les personnes qui composent la communauté de la défense sont importantes. Je demande que nous arrêtions de défendre des positions indéfendables lorsqu’il s’agit de la transition vers la vie civile.

Je suis prêt à entendre vos questions.

Merci, Monsieur le Président.

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